Titre : L’épouse barbare
Scénariste : Blandine Le Callet
Dessinatrice : Nancy Peña
Coloristes : Sophie Dumas & Céline Badaroux-Denizon
Éditeur : Casterman
Parution : Août 2016
Prix : 15€
Médée n’avait pas écrit ses mémoires depuis plusieurs jours car le souvenir de la mort d’Absyrtos avait ravivé en elle une douleur trop forte. Mais, il fallait pourtant qu’elle s’y remette. Elle reprend alors le cours de son récit pour révéler la vérité sur l’expédition des Argonautes qui n’est pas celle dont on se souvient. Ce voyage n’a pas été si fabuleux que cela, enjolivé par les Argonautes eux-mêmes surement. Elle se rappelle, qu’encore poursuivis par les hommes de son père, Aiétès Roi de Colchide, l’équipage longeait les côtes les premiers jours – à la rame la plupart du temps – sans s’aventurer en pleine mer pour atteindre Iolcos. Et chaque soir, il faisait escale à terre. Médée n’était pas la bienvenue dans le groupe mais Jason tenait bon car il avait promis de l’épouser pour qu’elle règne à ses côtés. Un jour pris dans des courants puis une tempête, leur navire avait dérivé contournant la Grèce et les menant jusqu’à l’île de Déprane régentée par le Roi Albinous. Mais une surprise attendait Jason et ses compagnons là-bas. En effet, les colches les avaient précédés. Et la suite des évènements ne furent pas tout à fait à l’image de la promesse faite par Jason à son épouse barbare.
Blandine Le Callet vous offre dans ce troisième volet de Médée une vision un peu moins reluisante de l’expédition de retour des Argonautes. Loin des envolées lyriques de la mythologie, la scénariste met en avant les manipulations et les désillusions de chacun. En effet, Médée manipule quelque peu Jason – pour l’aider- mais surtout les filles de Pélias. Le souverain d’Iolcos se joue lui aussi de Jason et de son peuple pour empêcher l’Argonaute d’accéder au pouvoir. Mais malgré cela, les résultats attendus ne sont pas au rendez-vous et les déceptions sont grandes pour tous. Que ce soit pour Jason, Médée ou encore les enfants du roi d’Iolcos. L’héroïne est très loin de l’insouciante jeune fille du début. Elle est devenue une femme déterminée – toujours plus savante – faisant face à un monde machiste qui la prive – du moins tente de la priver – de cette liberté d’action et de pensée qui lui est chère. L’album est de fait très dense mais d’une grande fluidité de lecture. Un écrit d’une grande finesse que Nancy Peña (Madame) illustre avec beaucoup de grâce et de sensibilité. Un trait élégant où l’on devine certaines influences artistiques de l’auteure (estampes japonaises, peinture symboliste, entres autres). La prestation dégage une belle énergie, plus intense encore que dans les deux tomes précédents (qui étaient eux aussi réussis). D’ailleurs, le travail de mise en couleurs du duo composé par Sophie Dumas (Le prédicateur) et Céline Badaroux-Denizon (Á boire et à manger) n’y est pas étranger. Les deux coloristes utilisent une palette chromatique dont les nuances sont parfaitement en accord avec les ambiances.
Un album en tout point remarquable !
Stéphane Girardot
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Une réponse à “Médée #3”