Albums marquants de leur époque, lancements de séries devenues cultes ou simples curiosités oubliées, Rétrobulle sera la rubrique remettant à l’honneur des bandes dessinées à l’occasion de leurs anniversaires.
Chaque mois, nous reviendrons sur ces titres qui célèbrent leurs 10, 20, 30, 40, 50, 60, 70 ou même 80 ans d’existence. Souvenez-vous…
« Lorsque j’ai ramené l’oncle Amerigo à sa chambre à l’hospice il s’est endormi immédiatement. Pour lui, buter trois pauvres prostituées doit lui servir de somnifère. Pour moi en revanche… » (James Ricci au début du chapitre quatre des Vieilles Canailles © Trillo/Mandrafina)
Il faut lire les Spaghetti Brothers, si possible en noir et blanc, et aimer l’humour noir pour apprécier tout le sel des deux tomes des Vieilles Canailles. Carlos Trillo et Domingo Mandrafina, deux auteurs emblématiques de la bande dessinée Argentine, nous dépeignent les péripéties d’une famille italo-américaine pour le moins atypique. Ils sont cinq frères et sœurs dans la famille Centobucchi. Il y a Tony, le policier, Caterina, l’actrice, Franck, le prêtre, Carmela la femme au foyer également tueuse à gage et Amerigo, l’aîné et chef mafieux de son état. Après quatre tomes des Spaghetti Brothers (pour l’édition d’origine en noir et blanc) la série commençait un peu à s’essouffler, le quatrième tome étant clairement un niveau en dessous des trois premiers. Les auteurs décidèrent alors de faire un bond de plusieurs dizaines d’années dans le temps à leurs personnages. Nous suivons désormais la vie de James Ricci, fils de Carmela. Dialoguiste de talent mais romancier sans succès qui cherche un bon sujet pour enfin écrire le roman qui lancera sa carrière. Ainsi, James va apprendre le truculent passé de sa famille en fréquentant son vieil oncle Amerigo, puis auprès des autres membres encore vivants de la fratrie. Et il ne va pas être déçu…
Se déroulant à la fois dans le futur et dans le passé par rapport aux histoires des Spaghetti Brothers, les histoires des Vieilles Canailles mettent à jour tous les secrets de la famille Centobucchi. Publié en juin et septembre 1999, le diptyque a bénéficié d’une intégrale en 2001 éditée par Vent d’Ouest qui avait publié auparavant les Spaghetti Brothers. A lire et à relire si vous aimez l’humour noir.
« Dire que tout ça, c’est à cause d’Albert… » Jean van Hamme dans la préface du tome 1 de S.O.S. Bonheur en février 1988 (© Aire Libre)
S.O.S. Bonheur, malgré son nom peu engageant, est une excellente trilogie de la fin des années 80. Si les deux premiers tomes étaient des recueils de nouvelles exacerbant chacune jusqu’à l’absurdité extrême un élément de la société française des années 80, ce troisième tome prend une forme plus classique avec une histoire unique. Après la santé, la carte universelle, la culture, le travail ou encore le contrôle des naissances et la gestion des congés, c’est la justice, assistée par ce qu’on n’appelait pas encore l’intelligence artificielle, qui est mise en exergue dans ce troisième tome. Lorsqu’un homme se retrouve ainsi condamné à mort pour une simple rixe dans la rue, c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase… Regroupant les protagonistes des six nouvelles des premiers tomes, ce final est ainsi le lieu d’une révolution, du moins en apparence. Manipulant le lecteur comme il sait si bien le faire, Jean Van Hamme termine sa critique acerbe de notre société de façon un tantinet grandiloquente. Un peu datée car bien ancrée dans la fin du XXème siècle, cette trilogie des deux auteurs belges reste néanmoins culte. La reprise récente pas Stephen Desberg au scénario, toujours avec Griffo au dessin (qui a bien progressé graphiquement en trente ans), est la preuve de l’empreinte qu’a laissé cette série à l’époque. Néanmoins cette reprise confirme aussi qu’on ne peut pas si facilement remplacer Jean Van Hamme dans l’exercice de la création de scénarii intelligents.
Paperinik, contraction astucieuse de Paperino (nom italien de Donald) et de Diabolik, célèbre personnage des Fumetti italiens. C’est ainsi que naquit il y a 50 ans celui que l’on nomme en France Fantomiald. Toutefois, lorsqu’on sait que Diabolik fut inspiré par les aventures de Fantômas (celles du roman de Pierre Souvestre et Marcel Allain en 1911, pas les films avec Jean Marais et Louis de Funès), on comprend encore mieux la pertinence du nom Fantomiald en Français.
L’idée est venue aux scénaristes Elisa Penna et Guido Martina de donner une revanche à Donald si souvent dindon de la farce face à Gontran ou Picsou, suite aux demandes des lecteurs italiens de Topolino, (le Journal de Mickey local) de voir Donald prendre sa revanche. Giovan Battista Carpi créa graphiquement Fantomiald qui a peu changé depuis. Ainsi, Donald le malchanceux prend-il sa revanche sous les traits de Fantomiald avec l’aide de Géo Trouvetou. Le succès de la première histoire fut immédiat et dès 1970 les histoires de Fantomiald vont s’enchainer. Les plus grands dessinateurs italiens dessineront Fantomiald : Romano Scarpa, Giorgio Cavazzano, Marco Gervasio ou encore Massimo de Vita, les grands noms de la fin du XXème siècle. Seul Marco Rota parmi les grands noms italiens de l’époque n’a pas dessiné une aventure de Fantomiald, il n’aura fait que quelques couvertures. On peut toutefois regretter que l’esprit vengeur de Donald initié par les premières histoires scénarisées par Guido Martina aient souvent fait place à des histoires plus classiques de super-héros façon comics américains depuis les années 90, histoires où Fantomiald se contente d’aider Picsou à défendre son coffre ou à lutter contre des super-méchants, notamment dans les histoires brésiliennes ou danoises (même si pour ces dernières le dessin talentueux de Flemming Andersen fait parfaitement passer la pilule).
Publiées en France à partir d’octobre 1974 dans Mickey Parade 1166bis, l’intégrale des aventures de Fantomiald est reprise depuis les débuts à la fois en kiosques par Hachette depuis 2017 et plus récemment dans une édition plus luxueuse par éditions Glénat. Ne passez pas à côté des aventures du vengeur masqué, toujours aussi jeune malgré ses 50 ans. Vous pouvez par contre volontairement passer sous silence les deux séries d’histoires de PK, alias PowerducK, qui n’ont rien à voir avec le personnage de Fantomiald hormis une proximité vestimentaire.
Ainsi se termine ce Rétrobulle très international de juin 2019. Rendez-vous cet été pour de nouveaux anniversaires !
Christophe Van Houtte
Réagissez !
Pas de réponses à “Ils fêtent leur anniversaire en… Juin 2019”