- Titre(s) : Hacker la peau
- Scénariste(s) : Sabrina Calvo
- Dessinateur(s) - Coloriste(s) : Jul Maroh
- Editeur(s) : Le Lombard
- Parution : Octobre 2023
- Prix : 19,95 €
- EAN : 9782808211901
Lyon Confluence, futur proche ? Prin est une poétesse à la recherche d’un troisième et mystérieux cours d’eau qui naît de la rencontre entre le Rhône et la Saône, Axl quant à lui est un hacker en déconstruction et Molly est couturière. Ensemble, ielles forment un trio polyamoureux aux relations assez instables qui va vivre une nuit de tous les dangers. En effet, l’extrême droite a remporté les élections présidentielles et la France voit un déferlement de violence s’abattre sur les minorités. Le soir, après le couvre-feu imposé par l’État, les milices de la France aux Français chassent dans les rues les citoyens qu’elles estiment anormaux. Leurs cibles sont essentiellement des personnes queer comme Prin, Molly et Axl. Traqués toute une nuit, ielles doivent fuir entre les traboules et les quais du Vieux Lyon ces extrémistes et fascistes totalement hermétiques aux trans-identités pour survivre. Au bout de ce chemin scabreux, ielles atteindront peut-être le refuge dans la forêt où la source du fleuve sans nom se situe afin de se retrouver et continuer d’exister ?
Avec Hacker la peau, le lecteur est devant une bande dessinée vraiment particulière et à part dans le monde du 9e Art. Dans le bon sens des termes s’entend. Sabrina Calvo utilise le merveilleux, la poésie et le post-cyber-punk pour raconter l’histoire d’amour d’un trio polyamoureux, composé de Prin, Molly et Axl, mais aussi et surtout pour dénoncer les violences que subissent les membres de la communauté queer de nos jours. Ces personnes sont de plus en plus “exposées” et cela les met malheureusement en danger dans notre société qui est encore assez hermétique aux trans-identités. Le message est passé – et très bien passé – à travers une double temporalité – passé/présent – parfaitement bien gérée et quatre chapitres écrits selon le kishotenketsu (les quatre temps japonais). Malgré la gravité des propos, la scénariste se veut optimiste et finit sur une touche d’espoir soulignée par sa couleur, le vert, dans la dernière séquence. Les propos forts et engagés de ce récit, qui nous fait d’ailleurs déambuler dans un secteur emblématique de Lyon, sont magnifiquement servis et portés par le dessin généreux de Jul Maroh. Les tons pastel appliqués par le dessinateur pour le passé contrastent à merveille avec ceux plus sombres du présent. Art et Culture sont également judicieusement utilisés via une interprétation de La Liberté guidant le peuple d’Eugène Delacroix, l’utilisation du bas-relief intitulé Le Rhône et la Saône, une allégorie du sculpteur André Vermare qui trône place des Cordeliers à Lyon, ou encore la représentation de performances d’artistes (Koji, Vikken, Tisiphone) dans le hackerspace. Plus la référence au lapin blanc qui court…
Une œuvre engagée, forte, militante extrêmement bien construite et illustrée. Une lecture d’utilité publique pour que s’ouvrent certains esprits !
Stéphane Girardot
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