
© 2019 Le Lombard
Titre : À la table des Empereurs
Scénariste : Isabelle Bauthian
Dessinateur – Coloriste : Raphaël Beuchot
Éditeurs : Le Lombard & Mango
Parution : Juin 2019
Prix : 17,95€
Le XIXème siècle est une ère de changements importants en matière de gastronomie et d’alimentation. L’hygiène et l’impact des aliments sur la santé sont plus considérés, de nouveaux modes de consommation – introduction de la viande de cheval et de la pomme de terre pour endiguer la disette, sans oublier les soupes Rumford – ainsi que des évolutions technologiques et scientifiques – la première usine de conserves est créée à Massy par Nicolas Appert en 1802 – apparaissent et les réseaux de transport ferroviaire et maritime se développent. Les prémices de la grande distribution pointent le bout de leur nez avec le premier grand magasin Félix Potin en 1850. La multiplication des restaurants, où viennent travailler des cuisiniers talentueux qui exercent de moins en moins dans les « grandes maisons » suite à la Révolution, n’est pas sans lien avec l’apparition des premiers guides et critiques gastronomiques (L’Almanach des Gourmands de Grimod de La Reynière, première édition en 1802) et l’avènement d’une certaine littérature de genre (Marie-Antoine Carême ouvre la voie, suivi par Antoine Beauvilliers, Urbain Dubois, Jules Gouffé, Auguste Escoffier ou encore Alexandre Dumas). De plus, la salle à manger prend une place importante et à part entière dans la maison. Tout comme le service à la russe remplace petit à petit celui à la française.
Le Lombard et Mango nous proposent une ultime – malheureusement ! – incursion dans les coulisses des cuisines du passé. Une série qui s’arrête donc avec À la table des Empereurs à un moment charnière où plusieurs évolutions de la gastronomie préfigurent nos modes d’alimentation actuels. Isabelle Bathian (Versipelle) nous met l’eau à la bouche à travers onze récits, scénarisés avec bonheur, qui relatent ces principaux changements. Si la cuisine évolue et s’élève doucement au niveau d’Art, que le nombre de restaurants augmente, la scénariste n’oublie pas de signaler que, durant cette période post-révolutionnaire, la richesse est voisine de la misère. Ce qui, bien entendu, engendre des mutations du comportement alimentaire. Lire cet album est un vrai régal et surtout une source d’enrichissement qui vous permettra de faire mouche lors de conversations autour d’une table. Pour augmenter le plaisir, les recettes d’époque sont encore présentes, tout comme le dossier final qui résume l’essentiel. Des parties préparées avec toute l’application nécessaire par le « Chef » Michel Tanguy. Si l’on salive en lisant, c’est également en grande partie grâce à la retranscription graphique qui en faite par Raphaël Beuchot. Le dessinateur de la Trilogie africaine, sur scénario de Zidrou (Le Montreur d’histoires, Tourne-disque et Un tout petit bout d’elles), exacerbe l’immersion dans la période. Le style est plus nerveux que celui qu’il avait l’habitude de nous servir et cela lui réussit parfaitement.
Un excellent tome qui fait regretter le fait qu’il soit le dernier de la série !
Stéphane Girardot
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