Yves Sente est scénariste de séries à succès, Blake et Mortimer ou Thorgal. Laurent Verron, lui, a repris Boule et Bill à la suite de Roba. Les deux auteurs s’offrent une nouvelle aventure chez Dupuis, non pas pour s’attaquer à Spirou, mais à Ptirou, le jeune mousse de sonnerie qui aurait inspiré Rob-Vel pour créer son personnage. L’album était présenté en avant-première à Saint-Malo, où est enterré le dessinateur. Nous en avons profité pour évoquer avec eux cette sortie très attendue…
Bonjour Messieurs, vous sortez d’une séance de dédicaces… Les gens n’avaient pas encore lu l’album, non ?
Yves Sente : Certains en avaient lu une partie dans le magazine Spirou, ça a commencé il y a 4-5 semaines. Il y en a qui commençaient à le lire dans la file (rires) mais ceux-là ne sont pas arrivés au bout.
Laurent Verron : Oui, ils n’ont pas fini. Mais la majorité, c’est vrai, ne l’avait pas encore lu… Ils ont flashé sur la couverture. Et puis il y a des lecteurs de Spirou qui doivent prendre tout Spirou, tout ce qui sort sur Spirou.
Même sans lire…
LV : Oui…
YS : Même sans comprendre que ce n’est pas Spirou (rires).
Justement, comment est né ce projet ? Je crois que c’est en lisant La Véritable Histoire de Spirou…
YS : Exactement, c’est ça. En lisant le passage où Rob-Vel raconte comment il a été approché par le fils Dupuis qui venait lui dire « voilà, on a un personnage en tête, il s’appellera comme ça, il aura telle et telle caractéristique, personnalité. Il faut lui donner une identité visuelle ». C’est à ce moment-là que Rob-Vel se souvient que, quand il était steward sur les traversées transatlantiques, entre autres sur L’Île de France, il y avait ces mousses de sonnerie, comme on les appelait, qui étaient là partout, en permanence, qui avaient l’âge du personnage qu’on lui demande d’illustrer… qui avaient pour certains une personnalité, évidemment, avec parfois des accidents tragiques… Il se souvenait d’un qui était décédé. Et c’est en pensant à eux qu’il a donné cette identité visuelle… En lisant ça, je me suis dit : « ce gamin-là, celui qui a eu cet accident, qui ne saura jamais qu’il a inspiré l’un des plus grands mythes de la bande dessinée, c’était quoi, sa vie ? ». Et j’ai eu envie de me raconter sa vie. Alors, ça m’est venu vraiment [il claque des doigts] comme ça, ce qui est très rare ! Souvent, un scénario, ça met un temps fou et là, je sais pas, en une nuit, je me suis relevé 3-4 fois, j’avais plein d’idées, même l’histoire de l’introduire par l’oncle Paul, tout ça, c’est venu très vite. Donc j’ai mis ça en forme en quelques pages et proposé à Dupuis parce que, quel autre éditeur aurait été intéressé ? (rires). Sergio Honorez, le directeur éditorial, qui m’avait filé le bouquin de La Véritable Histoire… me dit « ah, c’est super, on veut, on veut », mais restait à savoir qui allait le dessiner. C’est à ce moment-là que j’ai appelé Laurent qui était entre deux albums, ou tu finissais, je ne sais plus…
C’était ma question. Comment vous êtes-vous rencontrés pour cet album ?…
YS : Donc je l’appelle, je lui explique ce qui m’est arrivé et il me dit « ah mais je suis en train de lire La Véritable Histoire de Spirou ! », ce qui est quand même extraordinaire. Là, il y avait un signe, quelque part (rires). Donc je lui ai dit « Écoute, tu vas finir ton bouquin et puis tu liras ce que je propose ». Et là c’est lui qui raconte la suite de l’histoire…
LV : En fait, avec Yves, on se connaît depuis très longtemps puisqu’il était mon éditeur quand je faisais une série qui s’appelait Odilon Verjus au Lombard. Et puis on s’est retrouvé à un festival et on a repris un peu contact. Et là il m’appelle et me dit « on va faire un Spirou – Alors, j’ai déjà repris Boule et Bill… – Non mais c’est pas un Spirou… » Et c’est là qu’il me dit c’est… et je lui dis « mais je suis en train de le lire, le livre La Véritable Histoire de Spirou ! » Donc il a commencé à me parler de ce Ptirou, un personnage réel et ça m’a séduit parce qu’on n’est pas sur un personnage de BD. Je n’aurais pas pu m’empêcher, en faisant un personnage de BD, enfin un Spirou, de penser… d’avoir au-dessus de ma tête les grands qui ont dessiné Spirou : Franquin, Fournier, Tome et Janry, tout ça… Là, on est sur un personnage qui n’a jamais été représenté, qui est juste dans le souvenir de Rob-Vel. C’est génial. Voilà. J’ai dit oui !
Du coup, il y a moins de pression, on va dire, que pour dessiner Spirou…
LV : Une pression inconsciente : « c’est Spirou, donc il faut que je fasse du Spirou »… non. Et puis je voulais un peu m’éloigner de ces réflexes graphiques que j’ai avec Boule et Bill, qui est de la même famille graphique que Spirou, enfin Roba, Franquin, tout ça… Là, je suis un peu plus réaliste et ça tombait très bien !
YS : Moi, de mon côté, je ne suis pas du tout à l’aise avec la BD humoristique. Enfin, j’aime la lire, comme tout le monde (rires) mais, voilà, ce n’est pas mon truc d’écrire des gags. Dans Spirou, il y a quand même beaucoup d’humour, de situations un peu burlesques, et je ne me serais pas senti à l’aise. La première chose que j’ai demandé à Dupuis, c’est : « comme ce n’est pas Spirou, je suis libre ? Je vous préviens, c’est un album où il n’y aura pas d’humour ! – Ah non, non, ce n’est pas Spirou donc tu fais ce que tu veux. » Là-dessus, on était rassuré dès le départ. C’était libre, que ce soit sur le plan graphique ou sur le plan scénaristique. On n’est pas dans du vrai Spirou, ça se sent dans l’ambiance, et à la fin de l’histoire… (rires).
Voilà pourquoi ça n’intègre pas la collection Le Spirou de. Un peu comme le Gringos Locos…
YS : Oui, c’est ça ! Ça n’a rien à voir, ça fait partie de l’histoire de Dupuis, mais pas de l’histoire de Spirou. D’ailleurs, contrairement aux autres… les personnages de Spirou ne leur appartiennent pas mais Ptirou, il est à nous !
Là, c’est un auteur, Rob-Vel, qui, finalement, se retrouve dans l’histoire…
LV : Voilà.
Vous êtes tous les deux occupés sur des séries à succès. Comment avez-vous trouvé le temps de travailler sur Ptirou ?
YS : Euh, le temps… Moi, je suis un des scénaristes, je pense, les moins prolifiques de la profession. Voronov, je l’ai écrit en 1998 donc il y a en gros 20 ans. Et en 20 ans, j’ai publié 30 bouquins. 30, ça paraît beaucoup mais ça fait à peine un scénario et demi par an. Maintenant que je suis libre à plein temps, puisque, avant, j’étais aussi éditeur, je suis capable de faire 2-3 scénarios par an et j’ai la chance – appelons un chat un chat – grâce à Blake et Mortimer, de ne pas être financièrement obligé d’en produire 10. Sinon, je serais incapable de bien faire. Je suis assez lent en règle générale, j’aime bien prendre le temps, j’aime beaucoup me documenter. C’est un des premiers plaisirs de ce métier, c’est de découvrir en même temps que son scénario nous emmène là, là et là.
Ici, c’est le paquebot…
YS : Voilà ! Je ne connaissais absolument rien aux paquebots, aux transatlantiques, ni le contexte social… J’ai appris parce que le sujet m’y a amené. Comme dans les Blake et Mortimer, dans les années 50, je n’étais pas né, donc quand je fais un B&M, je suis content de découvrir la chose parce que le scénario m’oblige à aller me documenter là-dessus, là-dessus, là-dessus… Et ça fait partie de mon plaisir et, oui, j’avoue, j’ai une chance énorme, c’est que, je dois travailler pour vivre, oui, mais je ne suis pas obligé de produire dix scénarios par an pour survivre, ce qui est malheureusement le cas de certains dans la profession, parce que les ventes sont ce qu’elles sont…
Alors que vous, Laurent, vous étiez sur Boule et Bill. Vous avez dû faire une pause ?…
LV : Oui, alors, je fais une pause, là. Une grande pause, même ! Il y en a un qui est prévu cette année, il y en a eu un l’année dernière.
On l’a vu hier…
LV : Ah, il est déjà sorti ?
Ou en tout cas, il est à la vente ici…
LV : D’accord. Alors quand Yves m’a proposé le scénario… il m’a envoyé le scénario tout découpé… Et à la fin, il a mis une date, c’était « février 2014 ». Je m’en souviens très bien. Vous voyez, je l’ai fini, couleurs comprises, en septembre 2017. J’avais fait quelques premières planches et puis j’ai dû m’interrompre pour faire un Boule et Bill. J’ai repris un peu après, enfin je ne sais plus si j’ai fait un ou deux Boule et Bill… et puis à un moment, j’ai dit « bon, il faut s’y mettre sinon il va sortir dans 10 ans, ce n’est pas la peine ».
Il a fallu se renouveler graphiquement aussi…
LV : Oui, oui. C’est ce que je disais tout à l’heure. C’est réaliste, enfin pas complètement réaliste, ce n’est pas du XIII évidemment, mais c’est un peu plus réaliste et puis c’est assez dense. Il se passe pas mal de choses par page et, évidemment, Yves m’a fourni beaucoup de doc. J’ai trouvé aussi un peu sur internet… Il y a du boulot.
Vous avez procédé comment ? Un univers flottant comme ça, demande pas mal de documentation, dans ces cas-là, vous regardez quoi ? Des archives ? Des bouquins ?
YS : Sur internet, on découvre que tel livre existe. On essaie de se procurer tel livre. Et en général, c’est toujours pareil, quand on trouve une bonne source, dans la source, il y en a d’autres ! On peut passer des nuits à chercher de la doc.
LV : C’est passionnant. Parfois c’est très frustrant parce qu’il y a des choses précises, qu’on ne trouve jamais. Genre, la fameuse ancre, j’ai cherché, Yves a cherché… La salle à l’intérieur des bateaux où la chaîne de l’ancre s’enroule… La salle du gouvernail, aussi… Donc j’invente. Je prends une photo d’une salle avec des machines. On ne fait pas un récit documentaire, il faut donner l’impression au lecteur qu’il est sur place mais voilà, on n’est pas… C’est sûr que si on compte les rivets sur la coque… Après, la silhouette générale, on l’avait, on avait quelques photos sur L’Île de France donc on est à peu près dans les cordes sur la silhouette générale. Mais sur des détails… En même temps, c’est amusant d’inventer des trucs aussi.
J’ai une question pour vous, Yves. Faire conter l’histoire à l’Oncle Paul, c’est un clin d’œil à Dupuis, mais ça vous permet aussi d’utiliser pas mal les récitatifs comme dans Blake et Mortimer…
YS : Oui, c’est un avantage technique énorme. Puisqu’il y a des passages, on va dire, un peu chiants, dans une histoire, il y en a toujours (rires). Et là, il peut passer en disant « t’inquiète pas, hop, maintenant on passe à un autre personnage, boum ». Donc c’est un outil, je m’en suis rendu compte en l’utilisant, qui est très très très pratique, et qui nous sera encore utile plus tard.
LV : Ça permet des ellipses et des explications sans les décrire graphiquement. On peut dire « trois ans après, tac, il l’a rencontré là ». Une phrase suffit…
Des choses que vous ne pouvez pas trop vous permettre dans Blake et Mortimer, où c’est très codifié.
YS : Dans aucune série (rires). C’est venu par hasard mais c’est très original que ce soit une histoire qui soit racontée par quelqu’un dans l’histoire. En y pensant, c’était juste pour faire un clin d’œil et puis je me suis rendu compte que c’était vachement pratique, finalement. Un accident heureux.
L’histoire se termine – attention au spoiler pour ceux qui ne l’ont pas lu – sur un drame, qui est conforme au souvenir de Rob-Vel. Avez-vous imaginé une fin plus heureuse ou était-ce prévu de procéder ainsi ?
YS : C’était prévu comme ça. Ce qui était touchant, c’était que ce gamin était mort, justement. Si ça n’avait pas été le cas, je ne sais pas si j’aurais été aussi pris pendant ma lecture. C’est ce côté jeunesse gâchée alors que cette jeunesse gâchée a donné lieu à un mythe qui vit encore 80 ans après. Mais c’est injuste pour ce gamin ! C’est presque une envie de…
LV : … réhabiliter.
YS : Oui, de lui rendre hommage ! Le pauvre, il n’en profitera jamais ! Il ne saura jamais ce qu’il a inspiré. Alors que si Rob-Vel avait dit « j’ai croisé des mousses de sonnerie », point barre, sans parler de cet accident tragique, la phrase ne m’aurait peut-être pas du tout arrêté dans ma lecture.
LV : Et puis, moi je trouve que c’est la vraie vie, quoi. Pourquoi ne pas raconter un héros qui meurt ? Même pour un truc grand public. On ne peut pas toujours faire le happy end.
Et puis, on pense même aux autres Spirou, ce n’en est pas un, mais par exemple celui d’Émile Bravo, qui n’est pas très gai non plus… Ptirou se comporte en héros lui aussi…
YS: Il sauve la petite Juliette, oui.
Selon Rob-Vel, apparemment, c’est peut-être seulement un cache-cache qui a mal tourné… Il a fallu construire quelque chose de plus…
YS : Bien sûr. On se l’est réapproprié.
LV : C’est un roman, c’est une fiction. Ça, c’est clair.
Je n’ai pas fait un comparatif mais j’ai aussi l’impression qu’on n’est pas très loin… que c’est presque un préquel à Spirou, finalement. Ça rappelle un peu Le Bâton de Plutarque, que vous avez fait, Yves, pour Blake et Mortimer. C’est un style qui vous plaît, ça, d’essayer d’imaginer l’avant ?
YS : C’est tout à fait autre chose, ce Bâton de Plutarque, c’est un préquel de personnages de bande dessinée. Là, ce n’est pas un préquel de Spirou, c’est autre chose… Il faut trouver un nouveau mot.
LV : Le fait qu’il ait inspiré Rob-Vel, ce n’est pas l’argument principal de notre album. C’est d’abord une histoire : celle d’un personnage sur un bateau qui rencontre d’autres personnages. C’est un drame avant tout. Et on en avait parlé un peu avec Dupuis, on peut parler du fait qu’il a inspiré le créateur Rob-Vel mais l’important, c’est d’abord l’histoire au premier degré : sur ce bateau, il y des personnages qui se rencontrent. Ce gamin part pour les États-Unis parce qu’il est orphelin, il vient de perdre sa mère, il est passager clandestin, il arrive à se faire embaucher comme mousse de sonnerie, il rencontre cette jeune fille… C’est ça aussi qui est l’argument de l’histoire.
L’hommage est un prétexte.
YS : Oui, c’est d’abord un drame. Celui qui ne connaît pas Spirou – si tant est… enfin peut-être dans les jeunes lecteurs – doit passer le même moment qu’un autre. Celui qui connaît les références aura peut-être un sourire en coin à un moment ou un autre mais c’est pas l’objectif premier de ce livre.
Et il y a beaucoup de références ou justement, vous vous êtes dit…
YS : J’allais vous le dire. Ce n’est pas le but. Si vous les trouvez, vous les trouvez, si vous ne les trouvez pas, ce n’est pas grave. Je ne vais pas faire la liste, parce qu’il y en a beaucoup (rires), et je ne dirai jamais lesquelles parce qu’il y en a qui sont très subtiles, que ce soit dans le dessin, dans des répliques…
Je suppose que vous connaissez tous les deux, peut-être par cœur, cet univers-là…
YS & LV : Oui !
LV : Moi, personnellement, je suis lecteur de Spirou. Mes influences graphiques, c’est Gaston, c’est Boule et Bill. Après, oui, on s’intéresse à la vie du journal et moi j’ai beaucoup appris avec le livre La Véritable Histoire de Spirou. Il y a plein de choses que je ne savais pas. C’est très intéressant.
C’était une récréation cet album, en fait ? Vous avez pris… on ne va dire plus de plaisir que sur certains albums…
LV : Ah si ! Moi j’ai pris plus de plaisir à faire ça qu’à faire Boule et Bill. C’est à nous, ça ! En plus, graphiquement, j’ai fait des recherches, j’essaie d’évoluer… C’est un grand grand plaisir d’avoir fait ce bouquin.
Vous allez retourner à vos séries classiques tout de suite ? Ou ça vous donne envie de faire d’autres choses ?
YS : Ah mais on a une idée pour la suite. Mais laquelle, puisqu’il est mort, me direz-vous. (rires)
Donc ce n’est pas exclu qu’il y ait un autre album.
YS : C’est même plus que… C’est prévu.
LV : C’est prévu.
YS : Ce n’était pas prévu du tout au début. Pour le coup, c’était vraiment un one-shot et quand l’histoire s’est mise en route, que les premières planches sont arrivées, moi j’ai découvert Juliette. Elle était dans ma tête mais je ne savais pas quelle tête elle allait avoir… et pas l’effet qu’elle allait me faire. Je trouve qu’elle a une personnalité… Je sais pas, j’étais séduit par cette gamine, par sa personnalité. Par sa beauté, elle est très mignonne et tout, mais y a quelque chose qui se dégage. Laurent a intégré, inconsciemment ou pas, que c’est une petite fille malade, donc peut être plus mature que les autres, aussi…
C’est vrai qu’on s’attache vite à la lecture…
YS : Et on s’est dit « c’est vraiment dommage qu’on ne sache pas, nous, ce qui va lui arriver » et c’est d’ailleurs la dernière question, dernière page, dernière planche, de la petite Marie. C’est pas innocent si on a fait ça à la fin. « Il te racontera la suite une autre fois » ! Eh bien on l’a fait, pour nous, aussi. On a envie de savoir ce qu’elle devient.
Avant le lecteur !
YS : Oui. D’abord, on se raconte des histoires à nous. En espérant que ça plaira à d’autres. Si ça ne nous plaît pas, c’est mal parti.
Excellente nouvelle.
YS : En même temps, on n’a pas envie de faire une série classique avec un album par an, des personnages qui ne bougent pas en âge… Donc on envisage de la reprendre plus tard dans sa vie. C’est une manière de ne pas s’arrêter sur le tragique. Montrer que la vie continue et, pour cette gamine, qui va devenir plus grande, Ptirou restera aussi dans sa tête. Ce sera un peu son Jiminy Cricket, elle ne l’oubliera jamais.
Et vous, Laurent, vous laissez Boule et Bill de côté complètement, ou vous ne savez pas ?
LV : Pour plusieurs années, je pense. Je vais me consacrer à la suite, donc. J’ai un projet, enfin des velléités scénaristiques… J’aimerais bien… J’ai un univers, j’ai plus ou moins une histoire donc je voudrais pouvoir tout faire : scénario, dessin. Je commence à travailler là-dessus et puis, Juliette… Je ferai peut-être encore un Boule et Bill un jour mais qui sera complètement différent.
Vous n’avez plus envie ?
LV : Ah, les 44 gags, machin, dans le jardin, avec la haie, la maison… j’en peux plus (rires).
Quant à vous, Yves, il y a un Blake et Mortimer prévu pour l’an prochain ?
YS : Oui, oui, l’an prochain et le suivant. Un diptyque est en route avec deux dessinateurs hollandais.
Des nouveaux dessinateurs, dans la série, donc ?
YS : Oui, André Juillard est un peu comme nous tous. Il n’a pas envie de faire des Mortimer chaque année, certainement pas, il a d’autres projets puis il a aussi envie de faire lui-même… peut-être un one-shot tout seul. Enfin bref… Mais il m’a déjà dit « oui, je vais refaire un Blake, donc prépare » (rires) mais c’est peut-être pour dans 2-3 ans. À certains moments dans la carrière, on a tous envie de varier les plaisirs. Tout le monde n’est pas formaté pour faire un personnage qui ne bouge pas pendant septante albums. Soixante-dix, pardon.
Ça donne des résultats comme ça [Ptirou], qui changent..
LV : Ah oui, ça fait du bien.
Ça se voit, on voit que vous avez pris du plaisir.
YS : Ah ça, on s’est vraiment bien amusés (rires).
Parfait, merci beaucoup !
Propos recueillis par Nicolas Raduget et Arnaud Gueury
Interview réalisée le 28 octobre 2017.
Toutes les images sont la propriété de leurs auteurs et éditeurs et ne peuvent être utilisées sans leur accord.
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3 Responses to “Dans la bulle de… Yves Sente et Laurent Verron”
12 février 2018
Nono BillyBel entretien, on se croirait à bavarder entre amis, un verre à la main, au coin du feu… En tous cas l’album est une réussite, tant du point de vue graphique que scénaristique. Une superbe réussite même ! On entre dans l’histoire et on n’en sort plus, pris par le destin de ces personnages attachants. On se balade dans les couloirs du paquebot, on dine à la table du commandant, on devine les bruits, les odeurs des salles des machines. On suit le manège de tous ces jeunes mousses de rouge vêtus, partout. On en aurait presque le mal de mer…
Bravo messieurs. Vous avez illustré une légende, donné un visage à un mythe. Excellente idée que cet album, un BD qui parle de la naissance d’une BD, c’est jouissif. Et puis le format est bon pour apprécier les planches du sieur Verron.
13 février 2018
Stéphane GirardotMerci !!