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Dans la bulle de… Théo Grosjean

Par Geoffray Girard | le 31 octobre 2022 |
A la une Grosjean, Théo Interviews

© 2022 La Ribambulle

Jeune auteur qui monte, Théo Grosjean était présent au Festival Quai des Bulles de Saint-Malo pour présenter L’Homme le plus flippé du monde et Le Spectateur. L’occasion pour La Ribambulle d’aller à sa rencontre pour en savoir plus sur ce jeune auteur qui fait de ses angoisses et son anxiété une force créative au service de ses BD.

Théo Grosjean © 2022 La Ribambulle

Merci d’avoir accepté de répondre à nos questions. Pour commencer, qu’est-ce qui t’a donné envie de faire de la BD ?

Alors, il y a plusieurs étapes. La première est assez simple, c’est la rencontre avec la « sainte trinité », Astérix, Gaston Lagaffe et Les Aventures de Tintin, qui m’a bouleversé comme tout un chacun. Je lisais surtout Astérix parce que j’aimais beaucoup ce petit univers fermé avec des personnages qui sont toujours les mêmes. Ça m’apaisait mentalement de retrouver cet univers et de retrouver ces personnages. Même s’il leur arrive des trucs, il y a toujours la même « structure ». C’était pour moi très cool. Je relisais plein de fois ces albums-là. Donc, je pense que c’est le premier contact avec la BD que j’ai eu, entre 5 et 7 ans. Et plus tard, vers 8-9 ans, 10 ans, ma mère a été mutée à Paris. Pour des raisons stratégiques, vu qu’on était logé chez des amis de ma mère parce qu’on n’avait pas trouvé d’appartement, elle travaillait dans le centre de Paris et m’avait mis dans une école à côté de son travail. Là, il y avait une bibliothèque jeunesse dans laquelle elle me laissait parfois parce qu’on ne finissait pas toujours aux mêmes horaires. Dans cette bibliothèque, il y avait un choix de bandes dessinées qui était énorme, vraiment colossal. C’étaient des BD que je n’aurais pas forcément eu l’occasion de lire sans ça. En parallèle de ça, il y a un gars avec qui je traînais parce que je faisais de la guitare. Sa mère était illustratrice, et lui était fan de Donjon, la série de Joann Sfar et Lewis Trondheim. Il me racontait les épisodes mais je ne connaissais pas la série. Il me disait : « dans tel livre, il y a Marvin Rouge qui fait ci » et moi, je m’imaginais un truc ultra glauque, ultra violent, parce qu’il ne me racontait que les scènes de violence… Je m’imaginais un truc hardcore et je pensais que la BD ne serait même pas à la bibliothèque. Mais, en fait, ils avaient toute la collection parce qu’ils devaient penser que c’était un truc jeunesse. Ce qui n’est pas vraiment le cas. Et donc je suis tombé dedans. Ça m’a vraiment bouleversé. Après, j’ai lu plein d’autres BD un peu moins classiques et ça m’a ouvert à ce monde-là.

Ta première BD, c’est L’Empire du pire.

Oui.

Et tu as commencé par le scénario.

J’ai fait le dessin et le scénario, mais à quatre mains avec ma copine, Auriane Bui, on a tout fait ensemble. Parfois, elle faisait le scénario, parfois le dessin, et inversement. Mais je suis souvent crédité comme scénariste, effectivement.

Ensuite, ça a été Un gentil Orc sauvage, pour lequel tu as reçu deux prix. C’était une surprise ?

Oui, carrément. Ce qui est bizarre, c’est que le livre est resté assez confidentiel. Il n’a pas fait beaucoup de ventes mais j’ai eu un succès d’estime dans la presse, les prix et tout. Je pense que c’est difficile à refaire parce que c’était, entre guillemets, mon premier vrai livre, L’Empire du pire était une parodie et ciblait vraiment un autre public. Et donc le côté premier bouquin d’un jeune auteur qui sort un peu de nulle part attire l’attention des festivals. Il faut aussi que ce soit bien, évidemment.





 

Ça a attiré l’attention d’éditeurs ?

Exactement ! j’ai ensuite eu moins de mal parce que je galérais à retrouver un projet pour après. Mais, au final, ça m’a débloqué complètement puisque j’ai eu plein de propositions.

Comme avec L’Homme le plus flippé du monde…

Alors, L’Homme le plus flippé du monde, justement, je l’avais commencé avant d’avoir les prix parce que je cherchais à créer un nouveau projet. Mais je n’y arrivais pas trop parce que je me focalisais sur le fait d’être édité, et ça ne fonctionne pas comme ça, je pense. Je me suis dit qu’il fallait que je me recentre sur un truc simple, qui me fasse plaisir et que j’aime dessiner, qui ne me prenne pas trop de temps. Et j’ai commencé à faire L’Homme le plus flippé du monde sur Instagram, en 2018 je crois…

L’Homme le plus flippé du monde – épisode 1 © Éditions Delcourt

Le premier post est du 20 décembre 2018. C’est après…

Ah bah c’est après les prix, je dis n’importe quoi. Mais c’était à peu près la même période parce que j’ai le souvenir d’être là-bas et de penser à des strips. Donc, c’était vraiment la période où j’ai commencé à y réfléchir. Ce qui est marrant, c’est qu’en faisant cette série qui était plus une « détente » pour retrouver le plaisir de dessiner, ça a assez vite pris sur internet. Donc, j’ai continué à l’infini (rires), jusqu’à faire des centaines d’épisodes et maintenant c’est devenu ma série principale, même si, là, je fais une petite pause. Mais je vais reprendre.

Justement, comment passer de l’univers assez fantastique du Gentil Orc sauvage à cet univers plus réaliste ?

J’adore la fantasy. Je suis un énorme consommateur de fantasy. Je lis plein de trucs, même en littérature classique entre guillemets. Mon ambition sur Un gentil Orc sauvage, c’était de créer mon univers, un peu à la Tolkien, George R. R. Martin ou Robin Hood, tous ces grands auteurs et autrices de la fantasy. Je voulais faire des albums pendant des années, chez moi, en train de crever d’une maladie liée à la mauvaise posture du dessinateur (rires). Sauf qu’au final, ça n’a pas assez marché pour qu’il y ait d’autres tomes, tout simplement ! J’avais d’ailleurs imaginé plein plein d’histoires autour du Gentil Orc sauvage. Ça m’énerve de ne pas les utiliser, donc, en ce moment, je tiens un carnet où j’écris toute l’histoire avec des dessins. Je sais que ce ne sera jamais publié, et ce n’est pas publiable, mais ça se rapproche d’une chronologie où il se passe plein de trucs. Il y a plein de pistes scénaristiques que je n’ai pas pu fermer dans le tome, donc j’étais un peu dégoûté.

Un Gentil Orc sauvage © Éditions Delcourt

Est-ce que le succès de L’Homme le plus flippé du monde ne pourrait pas relancer Un gentil Orc sauvage ?

Ce n’est pas impossible. C’est juste que ça demanderait tellement d’investissement que ça m’obligerait à arrêter d’autres trucs que je fais. La fantasy demande vraiment beaucoup d’investissement parce qu’il y a plein de détails. Mais en tout cas, j’ai des idées d’histoires. En fait, je me suis dit que la fantasy, ça ne marchait pas, ou en tout cas pas dans mon style de dessin. Il y a une grosse niche en France, particulièrement dans la BD, mais c’est une fantasy très codifiée, avec souvent un dessin semi-réaliste. Moi, c’était un entre-deux qui pouvait intéresser les lecteurs et lectrices de Donjon, mais c’est quand même une niche. Bref, je me suis dit que j’allais faire autre chose. Et donc, mon autre passion dans la BD et la littérature, c’était l’autobiographie. J’ai été beaucoup marqué par Persepolis de Marjane Satrapi, ou encore même Les Confessions de Rousseau. J’ai lu beaucoup d’autobiographiess dans mon adolescence et j’adore ça. Donc, je me suis dit que j’allais faire ça.

Et il y avait de la matière…

Oui. En fait, à ce moment-là, j’étais très très anxieux, très mal, et je me suis dit que tant qu’à être mal, autant que ça serve à quelque chose. Ça me semblait être le truc le plus naturel à raconter parce que c’était ma vie à ce moment-là.

C’est entièrement autobiographique ou il y a une part de fiction ?

C’est vraiment autobiographique. Souvent, je condense des trucs ou j’enlève certains éléments pour que ce soit plus rigolo au niveau de la lecture, mais ça part toujours d’un truc vrai. Il n’y a jamais rien que j’ai inventé de toutes pièces. C’est surtout que ce sont des moments d’angoisse que je ressens et que je retranscris. Donc, je choisis ces moments-là. On ne voit donc pas tous les moments où je suis bien et ça donne une impression d’un personnage qui va exploser à tout moment, alors qu’en fait, dans la vie, je suis un peu moins stressé, c’est juste que je choisis ces passages-là. Donc, ce n’est pas vraiment moi parce que j’ai fait des choix au « montage » qui créent un autre personnage.

Ce n’est que le mec flippé.

C’est que la partie flippée, c’est ça.

Et le fait de coucher ça sur papier, cela a-t-il un effet thérapeutique ?

Carrément. Ça fait partie des conseils que je donne tout le temps pour les gens qui ont de l’anxiété. Pas forcément en BD parce que c’est un peu complexe, mais même à l’écrit. Quand on ressent des trucs, le fait de l’écrire, c’est comme si on le sortait de soi, d’une certaine façon, et donc après on peut en rire ou le regarder avec plus de recul. De cette façon, je me suis rendu compte de plein de trucs : quand j’ai été à ce pic d’angoisse, je me demandais pourquoi j’étais tout le temps comme ça alors que ce n’était pas le cas avant ; pourquoi j’avais peur de tout alors qu’avant non. Et, en l’écrivant, je me suis rendu compte que j’avais toujours été comme ça. C’est seulement devenu exponentiel et donc insupportable à un moment de ma vie. Mais en fait, j’ai toujours été comme ça, sans le conscientiser. Après coup, je me suis dit que j’étais un gamin super parano. Plein de trucs qui me stressent aujourd’hui me stressaient déjà : j’avais peur des bombes nucléaires quand j’avais genre 6 ans ; j’étais obsédé par les documentaires sur le nucléaire ; je ne mangeais jamais dans la même cuillère que les autres… J’étais déjà un peu hypocondriaque et j’étais hyper petit donc ça ne vient pas de nulle part non plus. Mais je ne m’en étais pas vraiment rendu compte. Donc, ça sert de prendre du recul.

Flippé © Droits réservés

Et ta BD a donc été adapté en série animée ! Comment ce projet a-t-il pris vie ?

En fait, très simplement. C’est Kyan Khojandi – qui fait la voix, qui produit et qui m’a aidé à l’écriture – qui m’a contacté pendant le confinement. Il m’a appelé au téléphone…

Et tu as répondu…

Et j’ai répondu, ce qui est très étonnant ! C’est ce que je raconte à chaque fois : d’habitude, je ne réponds jamais aux numéros inconnus, surtout que j’ai eu des appels un peu chelous depuis que je fais ma série. Donc, je suis encore plus stressé qu’avant avec les appels. Je me suis dit que ça m’entraînerait pour les contacts téléphoniques donc j’ai répondu et c’était Kyan Khojandi. J’ai été assez étonné. Il avait dû avoir mon numéro par mon éditeur. Il m’a dit « il faut qu’on fasse une série de cette BD, j’adore. Par contre, je veux que ce soit toi qui fasses à 100 % le truc, comme nous on avait fait avec Bref ». Donc, j’étais très satisfait de ce premier contact parce que j’avais déjà eu une proposition vague d’adaptation qui voulait tout récupérer.

Ils achetaient juste les droits…

Oui, c’est ça. Ça m’inquiétait un peu. Vu que c’est de l’autobio, j’étais un peu en mode « oui, mais bon, c’est censé me représenter », donc s’il fait des trucs, je sais pas, pas écolo, par exemple, des trucs bizarres…. Donc voilà, j’ai adapté la série avec un co-réal qui est un de mes amis et qui bosse dans l’animation et on fait ça « maison ». On a tout fait, avec une équipe bien sûr, mais on a tout géré nous-mêmes, ce qui était excessivement stressant (rires), mais très cool. C’était une très bonne expérience. En plus, moi, je n’ai pas l’habitude de bosser avec des gens, donc c’était sympa. On a touché un peu à tout. J’ai fait la charte graphique, le chara design, des décors, j’ai fait un tout petit peu d’animation. J’ai un peu meublé tout ce qui manquait.

Flippé © Droits réservés

Tu ne fais aucune voix ?

J’ai fait la voix d’un vieux, très vieux personnage dans le bus, qui veut s’asseoir à une place. J’ai fait aussi d’autres petites voix. Et mon co-réal [Mothy] a fait la voix du gars dont le personnage pense qu’il a une bombe [le gars avec son sac de sport], dans le premier épisode. En fait, j’avais fait des tests de voix pour faire ma propre voix. Mais, en fait, c’est très technique.

Donc Kyan Khojandi ne t’a même pas contacté avec l’idée que ce soit lui qui fasse ta voix ?

Non, à la base, c’était censé être moi. Je voulais essayer, en tout cas, mais c’était hyper dur. Ça m’aurait demandé beaucoup de temps de formation. C’est un vrai travail de faire de la voix !

Vous n’avez pas un timbre si éloigné.

C’est vrai que ce n’est pas trop éloigné. Il a une voix assez jeune, donc ça passe bien… parce qu’il est quand même un peu plus âgé que le personnage.

C’est très fidèle !

Merci beaucoup !

Comment tu as choisi les « gags » qui ont été adaptés ?

C’est moi qui ai sélectionné les strips. J’ai essayé de sélectionner ceux où il y avait le plus d’humour au sein du « gag ». Parce qu’il y a beaucoup d’épisodes qui reposent sur une chute et, en dessin animé, une chute ne suffit pas. Il faut qu’il se passe plein de trucs. La chute est finalement beaucoup moins importante que dans une BD. Pour moi, dans une BD, la chute est très importante parce que c’est ce qui apporte le rythme dans l’album. Alors que dans l’animation, il faut qu’à chaque épisode, il se passe des trucs, qu’il arrive des choses au personnage, qu’il ait des réflexions drôles pendant l’épisode. Parfois, j’ai mixé deux épisodes entre eux. C’est donc au jugé, mais c’est ceux qui me semblaient être les plus riches en termes d’humour.

L’homme le plus flippé du monde © Droits réservés

Ce ne sont pas forcément des situations qui vont parler au plus de monde ?

Non, j’ai quand même un peu regardé les interactions que j’avais eues sur Instagram. J’ai choisi en priorité les posts qui avaient vraiment marché mais il y en avait certains qui n’étaient pas adaptables du tout. Et d’ailleurs, il y en a un qui a très bien marché sur Instagram et en dessin animé, c’est un de ceux que j’aime le moins, même s’il est cool.

C’est lequel ? 

C’est l’épisode de la zone de confort où il marche…. Je trouve qu’il n’y a pas assez de comique dans l’épisode parce que tout était basé sur la chute. Du coup, l’épisode est un peu long, pas forcément celui qui a le plus marché mais celui qui était le plus intéressant.

Le tome 2 est paru à peu près en même temps que Le Spectateur.

Exact, oui.

Tu l’as travaillé en même temps ?

Alors, Le Spectateur, je l’ai bossé en parallèle pendant deux ans.

Donc ça aurait presque pu être ta première, enfin ta deuxième, BD ?

Ça aurait pu sortir avant. Mais il y a eu le covid entre temps et mon éditrice m’avait proposé de le repousser pour que ça ne sorte pas en plein covid. Et finalement, il est sorti en plein covid puisque ça a duré beaucoup plus longtemps que prévu. Ça m’a fait gagner du temps sur l’album.

Tu as travaillé sur des albums très différents, avec ce hasard du calendrier qui fait que les deux derniers sont sortis quasiment en même temps. Comment en es-tu venu à travailler avec Noctambule ?

C’est l’éditrice qui m’avait contacté suite à mon prix à Montreuil, justement, pour Un gentil Orc sauvage. Elle avait bien aimé le bouquin et, sur le festival, elle m’avait demandé si j’avais des trucs car ça l’intéressait. J’avais 40 pages de storyboard du Spectateur mais trop moches, j’avais posé très rapidement l’idée. Donc, je lui avais envoyé un PDF pendant le festival, en mode airdrop sur le téléphone, c’était très informel. Et le lendemain, elle m’a dit « j’aime trop ». Je n’ai même pas fait de dossier. En fait, je n’ai jamais fait un dossier BD de ma vie. À chaque fois, ça s’est fait comme ça.

Le Spectateur © 2021 Éditions Soleil

Quelle est l’origine de cette histoire ?

L’origine, c’est un sentiment que j’ai. Un sentiment un peu plus difficile à exprimer que l’anxiété. Le Spectateur, ça part de ce sentiment, que beaucoup de gens de notre génération, à mon avis, ressentent mais sans forcément le conscientiser : c’est qu’on est né avec internet, ou quasiment ; on reçoit énormément d’informations en permanence et, en fait, je pense que ça crée une espèce de sensation d’être en train de subir l’actualité, et même la vie en permanence, sans pouvoir interagir. On est juste spectateur d’un flot d’informations permanent. En tout cas, c’est comme ça que je le ressens mais je pense que je ne suis pas le seul. Ça crée ce sentiment étrange que j’ai toujours eu, d’être un peu passif : les trucs se passent dans ma vie, mais j’ai l’impression de ne pas avoir trop de contrôle dessus. Même maintenant, ça me le fait encore un peu. J’ai l’impression de me laisser dériver au gré des événements. Ce sentiment-là, je voulais le décrire parce je l’ai depuis longtemps et j’y pense tout le temps. Je cherchais un moyen d’en parler de la manière la plus subtile possible, sans avoir besoin d’expliquer le phénomène. Et donc, j’ai eu cette idée à un moment, dans la nuit, j’étais dans la montagne en Haute-Savoie ; j’ai eu cette idée d’avoir une vue subjective et un personnage qui ne parle pas du tout parce que ça me permettait de mettre en avant ce fait de ne pas avoir de pouvoir sur les événements puisqu’il ne peut pas entrer en communication. Et, en même temps, je trouvais ça cool parce que, par définition, dans un bouquin, on tourne les pages mais on ne peut pas vraiment interagir avec l’histoire, on ne peut pas en modifier le cours. Donc, je trouvais ça intéressant en tant que lecteur ou lectrice de « subir » l’histoire et d’être dans la peau du personnage.

Et justement l’autisme est un moyen de montrer cela ?

Oui, alors, en fait, le monde pense que le personnage est autiste mais ce n’est pas sûr en fait. C’était une façon de montrer que les gens ne savent pas par quel bout le prendre. Ce qui est rigolo, c’est qu’à la sortie du bouquin, il y a plein de gens qui m’ont parlé de l’autisme non-verbal qui, apparemment, est très bien décrit dans le livre. Mais je n’avais pas du tout l’ambition de le faire autiste. C’est juste que j’ai des souvenirs d’enfance aussi : je parlais très peu, j’avais peu d’émotions sur mon visage. On a souvent dit de moi « mais ce gamin est autiste ». J’ai souvent entendu ça et ça m’a marqué. Mais je ne suis pas du tout diagnostiqué autiste. Je n’ai pas forcément envie de le savoir mais je trouvais ça intéressant de le retranscrire dans l’histoire.









 

Comme Un gentil Orc sauvage, il a eu un joli succès critique. Il était notamment dans la sélection pour le prix Ouest-France Quai des Bulles l’année dernière.

Oui, j’ai eu beaucoup de presse dessus aussi, par rapport à Flippé qui est un peu plus « mainstream ».

Peut-on dire un peu plus populaire ?

Oui, en fait, j’ai beaucoup de lecteurs, qui ne lisent et ne s’intéressent pas particulièrement à la BD, qui m’ont connu via Instagram. Et maintenant, avec la série, j’ai encore un nouveau public plus jeune, qui vient des réseaux. Parce que c’est publié sur TikTok, je touche un public encore plus large avec la série, ce qui est très cool. J’aime beaucoup ! Le Spectateur, c’est plus marketé roman graphique.

Peut-on dire un peu plus « élitiste » ?

Ce n’est pas ma démarche à l’écriture mais, effectivement, c’est plus dur à appréhender si on n’est pas déjà lecteur de BD. Ça rappelle certains codes. Mais j’ai quand même essayé de faire en sorte que ce soit lisible comme ça. J’étais conscient que ça n’allait pas forcément toucher tout le public que j’avais déjà.

Elliot au collège © 2022 Dupuis

Est-ce que tu as des projets ? Est-ce qu’on peut attendre d’autres aventures d’Elliot au collège ? Y a-t-il un album prévu ?

Oui, il est prévu en janvier. Il y a deux tomes quasiment finis, dont le premier qui sortira en janvier 2023. C’est ma série un peu principale maintenant parce que j’aimerais bien, si les retours sur l’album me le permettent, continuer la série très longtemps, en suivant le personnage qui grandit. J’aime bien ça. J’ai toujours bien aimé les sagas où les personnages grandissent : il y a Lou, par exemple, ou en beaucoup plus vieux Les Illusions perdues. Ce principe de développer des personnages sur des années, ça me fascine. Donc, j’aimerais bien arriver à faire ça. Pour l’instant, c’est une BD jeunesse parce que le personnage est un enfant et donc c’est un format assez classique franco-belge de planche à chute avec un petit fil rouge. Mais j’aimerais que le format de l’album évolue avec le personnage pour, qu’une fois au lycée, ce soit plus des gros bouquins avec moins de cases, plus comme du manga ; j’aimerais que le format évolue un peu au fur et à mesure pour que ça s’adapte au lecteur et que ça ne soit pas figé dans le temps dans un truc en « 48 CC » [une bande dessinée de 48 pages, cartonnée et en couleur] avec la chute à la fin.

Et l’éditeur te suit sur cette idée ?

Euh, pour l’instant, il est un peu mitigé mais en vrai il me laisse beaucoup de liberté sur un mode « oui, pourquoi pas, ça peut être cool ». Je sais que le rédac-chef de Spirou est très chaud là-dessus. Par exemple, sur le tome 3, je voulais déjà doubler le nombre de pages pour avoir plus de richesse. Mais ils m’ont dit « il faut peut-être déjà installer la série… ». Donc, je vais peut-être rester sur ce format-là sur toute la période du collège, et le lycée, si un jour il va au lycée, peut-être que ce sera plus épais avec des histoires plus intenses.

Donc ça permettrait de passer de gags à des histoires plus longues.

Oui, c’est déjà plus ou moins ce qui est en train de se passer avec le tome 2. Il y a vraiment un fil rouge très important dans l’histoire. Ça va aller dans ce sens-là, au fur et à mesure. Mais je reste quand même sur de la chute parce que c’est vraiment un exercice intéressant. Et surtout c’est publié toutes les semaines dans Spirou donc il faut quand même que ça se lise comme ça.

Graphiquement, le style rappelle un peu L’Homme le plus flippé du monde.

Oui, avec un peu plus de détails. Mais c’est dans cet esprit.

Elliot au collège © 2022 Dupuis

On peut remarquer une ressemblance entre l’ami de Samuel, Yacine, dans Le Spectateur et l’ami d’Elliot, Harry, dans Elliot au collège.

Ah oui ! C’est parce que dans les deux cas, ils sont inspirés d’un ami que j’avais au collège. C’est pour ça qu’il y a une ressemblance. Le personnage n’est pas tout à fait le même dans les deux albums, même pas du tout, mais c’est inspiré d’une personne avec qui je suis toujours ami aujourd’hui. Cette amitié m’a beaucoup marqué. Petite anecdote, à la base, il n’avait pas du tout cette coupe de cheveux dans Le Spectateur] il avait des cheveux bouclés, un peu rasés sur les côtés et je trouvais que ça faisait trop cliché « gamin de cité ». Donc, j’ai modifié tous ses cheveux sur toutes les planches au dernier moment. Ça m’a pris un temps fou (rires). Donc, il ressemble maintenant plus à Harry dans Elliott au collège.

Merci beaucoup. On est tous fans, autour de la table. Et tu as d’autres projets prévus ?

Merci, je suis ravi. Oui, j’ai L’Œil du cyclone, qui est la suite, enfin plus ou moins, de L’Homme le plus flippé du monde.

Ça, c’est chez Exemplaire.

Oui, chez Exemplaire, ça sort en décembre. J’ai fini. Enfin, il me reste deux pages à dessiner. Et je suis en train de préparer les goodies justement.

Merci beaucoup Théo d’avoir répondu à nos questions et bon festival !

Propos recueillis par Geoffray Girard et Chloé Lucidarme.

Interview réalisée le 8 octobre 2022.

Toutes les images sont la propriété de leurs auteurs et éditeurs et ne peuvent être utilisées sans leur accord.

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Tags DelcourtL'Homme le plus flippé du mondeLe SpectateurNoctambuleQuai des BullesThéo Grosjean

Description de l'auteur

Geoffray Girard

Département : Eure-et-Loir / Séries préférées : Les Aigles de Rome, Angel Heart, L’Atelier Mastodonte, Billy Brouillard, Cédric, Dad, Doctor Who, Monster, Sept, Le Petit Spirou, Titeuf, Les Tuniques bleues, 20th Century Boys… / Auteurs préférés : Guillaume Bianco, Mathieu Bonhomme, Raoul Cauvin, Janry, Jérôme Jouvray, José Luis Manuera, Obion, Tome, Zep… / J’aime aussi : le cinéma, lire, le calme, lire, sortir avec les ami(e)s, lire, voyager (réellement ou dans l’imaginaire), lire, le café au lait à goûter, lire.

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