Dans la bulle de… Dany

Par | le 4 avril 2024 |

Attendu depuis longtemps, Spirou et la Gorgone Bleue est le fruit d’une collaboration très attendue entre Yann et Dany. Nous avons eu le plaisir de rencontrer ce dernier à Angoulême pour qu’il nous raconte ses liens aux univers de Spirou et de Tintin, et les coulisses de cet album singulier !

Dany © 2024 La Ribambulle

Bonjour Dany ! On va parler de Spirou mais je sais que vous avez commencé chez Tintin. Vous ne boudiez pas Spirou pour autant ?

Non. C’est vrai que j’ai commencé mon parcours, ma carrière, chez Tintin parce que celui qui m’avait engagé comme assistant, Mittéï, était auteur là-bas, et Greg, qui m’a pris dans son studio après, était lui-même rédacteur en chef de Tintin. En réalité, depuis toujours, j’étais plutôt un lecteur de Spirou. J’étais plus proche de Spirou. Mais j’aime bien les deux en fait. Comme je le dis souvent : Spirou c’était le journal un peu des cancres, un peu rentre-dedans, un peu voyou, avec un humour plus trash, tandis que Tintin était le magazine des bons élèves. Mais il y avait du bon dans les deux. Jacobs, dans Tintin, par exemple, Hergé bien sûr et beaucoup d’autres, Tibet, Graton… Mais j’étais plus proche de l’univers de Spirou et, surtout, c’est la découverte du personnage de Spirou, justement, dessiné par Franquin, quand j’étais tout petit, qui m’a donné vraiment l’envie de faire ce métier.

Et c’était quoi, votre rapport à Spirou et Fantasio ? Vos albums préférés de Franquin ?

Il y avait La Mauvaise Tête ! Je placerais peut-être La Mauvaise Tête… en tête, justement (rires). Beaucoup d’autres aussi. La Corne de Rhinocéros. Tous les albums sont formidables. En fait, je suis tombé dedans quand j’étais petit parce que ma mère était libraire, donc toutes les semaines… Vous vous rendez compte, pour un enfant qui rêve de faire de la bande dessinée, on avait toutes les semaines des gens comme Franquin, Peyo, Tillieux, Morris, Hubinon… On avait quand même une chance incroyable, des choses d’une très très grande qualité.

On va parler de Spirou et la Gorgone Bleue en particulier. Vous connaissez Yann depuis longtemps, j’imagine ? 

Oui ! On se connaissait déjà pas mal. On avait même travaillé fugitivement ensemble pour une parodie des Belles Histoires de l’oncle Paul, on avait appelé cette histoire La Bête de Gévaudan. Yann et Didier Conrad au scénario et moi au dessin. Et c’est eux d’ailleurs qui m’ont conseillé à ce moment-là d’oublier un peu ce côté ligne claire, le travail à la plume et à l’encre de Chine. « Non, essaye de travailler avec un feutre, un bic même ! » Je les avais écoutés et, pour cette série-là, j’avais travaillé beaucoup plus librement, avec un feutre qui résiste à l’eau, quand même, et à la lumière ! Mais depuis lors je n’ai pratiquement plus repris la plume. Donc ils ont vraiment changé ma manière de dessiner. Elle est beaucoup plus enlevée, beaucoup plus libre.

Ils ont eu une influence indéniable.

Oui, bien sûr ! Mais il faut dire que j’avais reçu, et ça je l’ai toujours refusé par la suite parce que c’est épouvantable pour un dessinateur, un storyboard fait par Conrad. Vous imaginez la qualité ? C’était incroyable de spontanéité. C’était exactement ça qu’il fallait faire ! Or, moi j’ai horreur de copier, donc je m’efforçais de faire autre chose mais c’était moins bon que Conrad ! Ah lala, c’était une punition pour moi. Donc depuis, même si c’est un scénariste-dessinateur qui me propose un synopsis dessiné, je dis « non, non, tu écris ». Heureusement, tous les scénaristes ne dessinent pas comme Conrad (rires).

© Dupuis 2023

C’est Yann qui vous a proposé de faire cet album hors-série de Spirou 

Non, ça ne s’est pas passé exactement comme ça. On était à une soirée chez une amie commune et le directeur éditorial de l’époque, Sergio Honorez. J’étais en train de faire des compliments sur le Spirou d’Émile Bravo. Je trouvais absolument extraordinaire d’avoir interprété, d’avoir pris à son compte le personnage et d’en avoir fait quelque chose qui n’avait rien à voir avec l’univers de Franquin… Que c’était remarquable. Et le directeur qui m’écoutait me dit « mais pourquoi t’en fais pas un, toi ? ». C’était une proposition que je ne pouvais pas refuser. Même si ça m’a un petit peu effrayé parce que je me demandais si j’allais être à la hauteur. Je me suis un peu rassuré par la suite, très vite, parce qu’il m’a proposé deux jours après : « et si tu le faisais avec Yann ? ». Et là, banco, parce que j’adore son humour un peu trash. Je savais qu’on allait bien s’amuser. On s’entend très bien avec Yann, on déjeune très bien ensemble et on a les mêmes références, que ce soit en littérature, cinéma ou bande dessinée… donc c’était très bien. Par contre, ça n’a pas été un long fleuve tranquille. Pourquoi ? Parce que j’ai l’habitude d’interpréter un peu, je dis ça entre guillemets, les scénarios qu’on me propose, toujours avec l’accord du scénariste, ou en tout cas plus ou moins, et d’adapter ça à ma manière. Et Yann, lui, ne respecte pas son synopsis. Il fait un synopsis et puis il regarde un film, il lit un bouquin, et hop, il a d’autres idées et il les inclut. Finalement, je ne trouvais plus du tout le synopsis là-dedans. Je lui ai dit « il y a un problème » et lui de me répondre « oui mais c’est toi qui changes ». Partant de là, on s’est un peu disputés et on a arrêté de travailler sur ce Spirou pendant quelques mois… jusqu’au moment où l’éditeur, qui avait déjà payé 30 planches, nous dise : « bon, les copains, il faut s’y remettre ! » Donc on se donne rendez-vous au restaurant où on avait l’habitude de se voir et on arrive là. Il y avait donc les deux directeurs de Dupuis, le directeur de collection et le directeur principal, il y avait Yann et moi. Et Yann me sort « Tu as dit que j’étais un mauvais scénariste ! » alors je réponds « j’ai jamais dit ça », etc. On commence à s’énerver un peu. Les deux autres étaient un peu inquiets. Et puis je vais dans mon porte-documents pour prendre des documents, je sors un flingue et je le mets sur la table avec le canon vers Yann, et puis je continue à farfouiller. Les tables à côté se disent qu’on est chez les mafieux ! Là, il y a eu un moment de stupeur et puis un énorme éclat de rire, évidemment. Ça a tout débloqué. Yann m’a dit « mais tu ne veux pas me faire confiance ? » avec ses yeux de chien battu. J’ai dit « OK, je vais tout dessiner, sans discuter, tout ce que tu m’envoies, et on va terminer cet album ». Les deux directeurs ont commandé le champagne et ça s’est très bien arrangé.

Ça donc pris beaucoup plus de temps que prévu. 

C’est vrai ! Mais il faut dire que Yann a eu des ennuis de santé, il a fait un infarctus, et moi, entre la signature et ça, j’ai fait trois albums ! Un Guerrières de Troy, un Ludivine chez Glénat et Un homme qui passe chez Aire Libre.

Donc, ça a mis longtemps mais finalement le délai était très raisonnable.

Oui. Les 50 dernières pages, je les ai faites en six ou sept mois. Quand je bosse, je bosse vite. Mais pas souvent (rires).

© Dupuis 2023

Comment on s’approprie graphiquement les personnages qu’on a aimés quand on était enfant ? Vous avez pensé à vos albums préférés ou alors vous avez préféré les oublier ? 

J’avais envie qu’on identifie immédiatement Spirou et Fantasio. Donc les codes sont là, la mèche… D’un autre côté, c’est un « Spirou fait par » donc on nous demande de faire une version personnelle de Spirou. Moi, une de mes caractéristiques, c’est les jolies filles, donc Seccotine n’a pas grand-chose à voir avec la Seccotine de Franquin. Yann m’a aussi fait le plaisir de ressusciter une héroïne que j’avais créée avec Greg dans les années 1980, un truc comme ça. Et là, je me suis souvenu d’une phrase de Franquin, qui avait un sens de l’humour très aiguisé… Il me disait avec une lueur un peu coquine dans l’œil : « quand tu fais une caricature de fille et que tu fais des caricatures d’homme, n’oublie pas que tout ça doit s’emboîter ». Donc je ne pouvais pas faire un Spirou avec des proportions à la Franquin et dessiner une Seccotine ou une Gorgone à ma manière. Donc, c’est Spirou, incontestablement. Mais il n’a pas le costume de Spirou et il n’a pas les proportions de Spirou. Mais c’est Spirou.

Vous l’avez adapté à votre style pour que ça colle…

… aux autres personnages.

Dès le départ, avant qu’il y ait une petite embrouille, c’était déjà la malbouffe, le thème principal ? 

Ah oui ! Tous ces thèmes étaient là. Mais, par exemple, ce qui n’existait pas dans le synopsis, c’est le porte-avion. Il faut le dessiner, ce machin ! C’est Yann qui m’a parlé le premier de cette lutte contre la pollution des océans, du « septième continent », de ces plaques de plastique parfois épaisses de plusieurs mètres qui flottent sur les océans un peu partout… Il y en a plusieurs. Il m’a parlé de ça. Et c’est vrai que c’était un phénomène qui m’interpellait, ces espèces de vortex de plastique qui flottent comme ça, emmenés par les courants. Ça finit par faire des espèces de blocs compacts de plusieurs mètres de hauteur, avec des animaux qui s’incrustent là-dedans. C’est une catastrophe écologique extraordinaire. Donc c’était intéressant. Et l’idée que Champignac invente un truc à base de champignon qui bouffe les plastiques, ça m’amusait beaucoup. Par contre, la fin de l’album… je peux parler de la fin de l’album ?

© Dupuis 2023

Oui, oui ! (Avis aux lecteurs : passez à la question suivante si vous ne l’avez pas encore lu).  

Ce n’est pas vraiment la fin… mais, vers la fin, ces créatures, les « poulpitos » créés par Champignac, bouffent toute l’Afrique. Le problème est qu’ils ne sont pas comestibles donc ils n’ont aucun prédateur. Ils prolifèrent, ils prolifèrent, et ça devient une pollution en soi. Une pollution qui remplace une pollution. Et c’est un petit peu pour se moquer des extrémistes écologistes qui veulent tout remplacer, « plus de nucléaire », mais qui rouvrent des centrales à charbon, quoi… Parfois, la solution est pire que le mal. Mais voilà, c’est l’humour de Yann aussi. C’est-à-dire que Dieu sait si on se moque des pollueurs mais on se moque aussi des dérives écologistes extrémistes. Comme de tous les extrémismes.

Je ne m’en étais pas aperçu mais comme vous me parlez de cette mer de plastique, à bien regarder la couverture on découvre des petites blagues. On voit vos deux noms, ou encore celui de l’éditeur.

Oui, oui. C’est ça. Il y en a partout !

Il faut le relire 50 fois pour tout comprendre.

C’est plein d’allusions. Yann, pour ça, est absolument génial.

L’humour de l’album lorgne parfois vers la parodie, aussi.

Absolument ! Totalement.

Mais graphiquement, j’imagine, que pour vous c’est quand même différent. Il a fallu rester totalement dans du Dany, dans du sérieux…

Oui, il ne faut pas à un moment donné verser dans une sorte de caricature outrancière et puis juste après revenir à un réalisme… Ça n’irait pas. Il faut tout le temps faire attention et rester dans le même univers graphique.

© Dupuis 2023

Je ne sais pas si c’est que c’était un personnage difficile à dessiner mais j’ai trouvé que Fantasio, au tout début de l’album et à la fin, n’a plus tout à fait la même tête…

C’est vrai. Ça, c’est peut-être parce que, justement, il y a eu un laps de temps et j’ai un peu oublié comment je l’avais fait au début (rires). C’est vrai qu’il avait un côté moins rond.

Oui. Je l’avais mis dans ma chronique, que je vous avais envoyée d’ailleurs.

Oui, c’est vrai. Vous l’aviez remarqué. D’ailleurs, le Fantasio du début plaisait beaucoup à Laurent Ruquier, par exemple, qui m’a appelé pendant une émission parce qu’il y avait une chronique sur ce Spirou. Il disait que Spirou et Fantasio étaient devenus sexy. J’ai pris ça pour un compliment !

C’est un compliment. À la fin, Fantasio redevient plus rond, comme on le connaît…

Oui, c’est vrai. C’est une erreur de ma part.

Oh non, ce n’est pas grave !

J’espère qu’on me pardonnera ça. Mais c’est exact qu’à partir d’ici, il est devenu plus comme celui de Franquin. Alors qu’au départ, tout au début…

Il est plus allongé.

Oui, voilà. J’aurais dû revoir un peu. Enfin, c’est quand même lui.

© Dupuis 2023

Oui, c’est du détail.

Mais vous avez raison, c’est une erreur. J’aurais dû revoir la manière dont je le faisais. Spirou, ça va ! Et encore, ils sont tous un peu plus ronds… (rires)

Dans tous les cas, ça fait de belles planches !

On s’est bien amusé !

D’ailleurs, il y a quand même 86 planches. C’est presque l’équivalent de deux albums classiques.

C’est parce que le nouveau directeur émettait l’idée – je ne sais pas s’il continue dans ce sens-là – d’arrêter les « Spirou fait par » pour se recentrer, et c’est très cohérent d’ailleurs, sur la série-mère. Parce qu’il disait, et il a raison, qu’on ne sait plus très bien qui est Spirou. Donc voilà, on arrête les Spirou de. Mais je crois que ce n’est pas tout à fait vrai, je crois qu’il y en a encore qui vont sortir.

Et donc vous vous êtes dit « On va le faire très long » ?

Voilà. Ils voulaient arrêter donc ils ont dit « Faites-le en un tome mais en autant de pages que vous voulez ». Et on a fait un double album. Il y a un gag, c’est qu’à la fin de l’album, Yann, qui a plein d’idées pour faire une suite, a mis : « Bientôt Le Retour de la Gorgone Noire », etc. C’est une blague, évidemment, mais il y a énormément de lecteurs qui le prennent au premier degré et qui nous demandent « et alors, Le Retour de la Gorgone Noire ? ». Alors, on dit : « Écoutez, inondez la boîte mail des éditions Dupuis, demandez Le Retour de la Gorgone Noire, et on vous le fait ! ».

C’est marrant, il y a aussi l’annonce de La Mort de Seccotine alors que La Mort de Spirou est sorti.

(rires) Oui, bien sûr, c’est un clin d’œil. Ça, c’est l’humour de Yann, qui est fabuleux.

© Dupuis 2023

Qui va lentement va sûrement, comme on dit, et l’album a été plutôt bien accueilli. Vous êtes satisfait des différents retours des lecteurs ? 

J’ai beaucoup donné depuis sa sortie en septembre dernier. J’ai vraiment beaucoup dédicacé, dans des librairies, dans des festivals et d’autres rencontres presse, télé, radio, etc. Chaque fois, j’ai eu un retour fabuleux de la part des lecteurs que je rencontrais, qui me faisaient le plaisir de me dire la manière dont ils l’avaient lu. C’était exactement ce qu’on avait, Yann et moi, envie qu’ils lisent. Et qu’ils reçoivent comme message. C’est-à-dire une histoire d’aventure humoristique qui traite des problèmes actuels de pollution, de malbouffe, etc., mais toujours sous l’angle humoristique, pour s’amuser.  

En ça, ça se rapproche quand même beaucoup de la série-mère, à l’origine.

Oui, c’est vrai. Oui, tout à fait, il aurait d’ailleurs eu sa place dans le journal Spirou. On n’a jamais très bien compris pourquoi il n’avait pas été prépublié.

Vous n’étiez pas décisionnaires…

On n’a jamais eu d’explication. Ils ne nous ont pas publié, point. Maintenant, on ne sait pas pourquoi.

Peut-être pour les personnages un peu trop sexy… 

On en a vu d’autres dans Spirou, quand même.

Il faudra demander au rédacteur en chef. 

C’est à un journaliste de poser la question. Je compte sur vous !

© Dupuis 2023

Je demanderai à Morgan Di Salvia si je le croise, promis ! (NDR : ce sera chose faite quelques instants plus tard, nous l’interpelons alors qu’il passe près de nous. S’ensuit une discussion très courtoise entre le rédacteur en chef du journal et Dany). 

Merci d’avoir provoqué cette discussion, maintenant j’ai mon explication et nous sommes réconciliés.

Le festival d’Angoulême consacre aussi une exposition aux 77 ans du journal Tintin. 

Oui. J’ai été beaucoup sollicité par ça aussi, dans le même temps. C’est parce que je suis un des rares dinosaures survivants de cette époque. C’était amusant parce que j’étais invité sur des plateaux télé ou radio autant pour parler de Spirou que de Tintin. C’est marrant, non ?

Oui, et c’est ce qu’on fait aussi, finalement. J’ai lu dans l’ouvrage qui est sorti sur l’anniversaire du journal et j’ai revu dans l’exposition vos planches de Ric Hochet.

Ah oui, oui. Ça aussi, c’est une anecdote savoureuse parce que, quand on me l’a proposé… au départ, c’était vraiment les histoires emblématiques du journal Tintin reprises par d’autres auteurs. Il y en a qui ont fait leur propre histoire, qui n’avaient pas compris ou pour une question d’ego, je n’en sais rien… mais enfin, voilà. Tandis que nous, au départ, c’était vraiment « quel personnage du journal Tintin tu aimerais traiter en 1, 2, 3, 4, 5, 6 même 10 planches ? » Il n’y a eu aucune hésitation pour moi, j’ai pris Ric Hochet. Parce que c’est une série emblématique du journal, un héros incontournable et, surtout, dessiné par mon meilleur ami de l’époque, Tibet, qui malheureusement nous a quittés il y a plus d’une dizaine d’années. C’était un hommage à Tibet. Et donc j’ai fait ces six pages, qui ont été appréciées, d’ailleurs, y compris par les enfants de Tibet qui ont vraiment été très heureux de ça. J’ai aussi eu la surprise, car je n’en savais rien, que mon meilleur ami actuel, que j’ai pris plus jeune, Olivier Grenson, fasse un hommage à Olivier Rameau, ma propre série. C’est magnifique !

Ça vous a touché, cet hommage ?

Bien sûr ! Surtout que c’est magnifique, c’est d’une poésie incroyable. Je suis un fantaisiste mais lui est un poète.

Extrait du T10 de Ric Hochet © Le Lombard 1968

Votre hommage était très humble, dans le scénario à la fin. C’est vachement bien ce que vous avez fait ! 

En me moquant un peu ! Je voudrais dire à propos de Ric Hochet que ce sont des choses dont on rigolait ensemble avec Tibet. Lui-même rigolait de sa veste chinée. Dans une des pages du vrai Ric Hochet, à un moment donné, il ouvre son armoire et il y a une dizaine de vestons tous pareils (rires).

Ces quelques planches ont été difficiles à réaliser ou c’était un plaisir ?

Non, c’était un plaisir. Mais vous savez, ça part d’une anecdote : j’avais inventé une histoire où un gars se fait passer pour Ric Hochet pour lui faire du tort. Il commet de mauvaises actions sous un déguisement de Ric Hochet. Tout de suite, on m’a dit « mais ça a été fait ». Alors, je pars sur une autre idée : « mais ça a été fait ». Ils ont tout fait en fait, Duchâteau et Tibet ! C’est mon ami Félix Meynet qui m’a dit : « bah, fais ça ! ». Donc à chaque fois, j’ai fait une séquence où le rédacteur en chef m’appelle en disant : « mais non, ça a déjà été fait » !

J’imagine que vous n’avez pas peiné à trouver les albums que vous préfériez.

Ah, je les ai.

Donc vous vous êtes dit « je vais faire cette scène-là »…

C’est ça. J’ai essayé de trouver des scènes d’action.

C’est très réussi. Et vous avez participé avec d’autres à la rencontre qui a eu lieu ce matin.

Oui, avec Clarke, avec Boucq, avec Gauthier, et Aveline Stokart.

À cette rencontre, c’était un public de nostalgiques ou il y avait aussi des jeunes ? 

Ah, c’était un public très mélangé. Il y avait des lecteurs de l’époque, des barbus blancs. Mais il y avait beaucoup de jeunes aussi.

Donc ça continue de parler à tout le monde même si le journal a disparu depuis un moment.

D’ailleurs, il y a eu une question là-dessus : « mais pourquoi on ne recrée pas un journal ? ». C’est vrai qu’il ne reste pratiquement plus que Spirou, qui ne va pas très bien, mais c’est compréhensible quand on pense qu’ils ont refusé de publier notre album (rires).

Olivier Rameau vu par Olivier Grenson pour l’anniversaire du journal Tintin

Haha ! Est-ce que vous avez un autre projet, dans les cartons ?

Oui. C’est même des trucs qui sont signés mais je ne sais pas très bien par lequel je vais commencer. Il y en a un pour lequel je dois récupérer mes droits pour éventuellement revenir là où il est né, au Lombard, c’est Olivier Rameau. Un nouvel album, 15 ans après le dernier que j’ai fait. Il est écrit, dialogué, découpé, etc. Il ne reste plus qu’à, entre guillemets, le dessiner. Mais j’y tiens vraiment. Et je crois que c’est vraiment une très bonne histoire, ça va m’amuser beaucoup. J’aimerais beaucoup qu’il revienne au Lombard, ça va se négocier très prochainement. L’autre truc, c’est amusant aussi. Le Lombard a récupéré les droits d’adaptation de romans noirs américains, grosso modo des années 1950 à nos jours, et qui sont des histoires de gangsters. Ils m’en ont envoyé une dizaine. Il y en a que je connaissais et j’en ai choisi une. C’est une histoire de gangsters assez violents mais ce sont surtout des crétins, des Pieds Nickelés. Donc ça va me permettre d’aller jusqu’à la caricature tout en montrant la violence. Mais ils sont tellement bêtes qu’on peut également traiter ça d’une manière semi-humoristique, ou semi-réaliste. Et j’adore cet exercice ! Là aussi, il faut rester dans le même album, il faut faire très attention, être cohérent, mais c’est très amusant parce que, quand on a besoin d’exagérer un peu des mouvements ou même des scènes de violence, pour aller jusqu’à l’outrance, ça marche très bien quand on a un style semi-humoristique ou semi-réaliste.

Ça, ce sont des projets en solitaire ou avec des scénaristes ?

Ah, tous les deux, assez curieusement, ce sera moi tout seul au scénario. Mais bien sûr, l’adaptation du roman noir, c’est une adaptation de roman !

Merci beaucoup. 

Avec plaisir.

Propos recueillis par Nicolas Raduget.

Interview réalisée le 27 janvier 2024.

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Description de l'auteur

Nicolas Raduget

Département : Indre-et-Loire / Séries préférées : Tintin, Spirou et Fantasio, Johan et Pirlouit, Blake et Mortimer… / Auteurs préférés : Hergé, Peyo, Franquin, Tome & Janry… / J’aime aussi : écouter de la musique, boire, manger, et parfois tout en même temps…

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