Titre : À la table des Lumières
Scénariste : Rutile
Dessinatrice – Coloriste : Maud Begon
Éditeurs : Le Lombard & Mango
Parution : Octobre 2017
Prix : 17,95€
Le XVIIIème siècle voit sa cuisine tendre vers la sophistication, le raffinement et les conditions des repas changer. En effet, les sauces sont réduites pour plus de saveurs, allégées, plus onctueuses et Louis XV et sa favorite, Madame de Pompadour, boivent « le seul vin qui laisse la femme belle après boire » – à condition que le champagne soit bien battu – en lieu et place du vin. De même qu’ils privilégient les repas plus intimistes à la corvée du Grand Couvert. Un peu plus tard dans le temps, vers 1765, Diderot et Rousseau préfèrent fréquenter les restaurants qui ouvrent dans Paris plutôt que les obscures auberges car ils y sont bien mieux traités et plus au calme pour philosopher. Antoine Parmentier essaye désespérément d’imposer la pomme de terre qui fut sa seule nourriture dans les prisons prussiennes durant la guerre de Sept Ans. Poussant sous terre, le tubercule en provenance des Amériques n’a pas encore les faveurs du bas peuple et encore moins celles de la haute société. Et pourtant, à cette époque où les disettes et autres famines sont les principaux ingrédients de la Révolution qui monte, elle aurait parfaitement compensé le manque cruel de grains grâce à ses valeurs nutritives. Soyez les bienvenus À la table des Lumières !
À travers sept histoires finement scénarisées, Rutile nous fait découvrir les principales évolutions de cette nouvelle cuisine qu’est celle du XVIIIème et qui se veut plus sophistiquée et raffinée. Après À la table du Roi-Soleil, la scénariste remet le couvert avec bonheur pour un deuxième service dans la série où interviennent des personnages truculents – connus ou anonymes – et où l’humour est un ingrédient majeur. Vous goûterez ainsi avec délice les seins de la Pompadour, en sauce champagne, sur lit de chocolat servis par Louis XV et apprendrez aussi la légende qui circulait à l’époque autour de la forme des coupes de champagne ou vous vous installerez confortablement dans un des premiers restaurants de Paris en compagnie de Diderot ou Rousseau. C’est au choix, comme la carte des ces nouveaux établissements ! S’il est question, une fois encore, du faste des repas de la cour ou encore de ceux de Balthazar Grimod de la Reynière, la question des famines et disettes n’est absolument pas éludée. Et vous verrez que Parmentier, ardent défenseur de la pomme de terre, avait une solution en or à ces problèmes. L’ensemble est élégamment illustré par Maud Begon (Bouche d’ombre). Le trait affirmé de la dessinatrice ainsi que ses choix chromatiques nous offrent des ambiances chatoyantes et des moments contemplatifs des plus agréables. Saluons également le travail de Michel Tanguy qui commente les différentes pauses recettes entre les récits et propose un dossier final très pertinent.
Un opus maîtrisé de bout en bout, fort intéressant et très… éclairant !
Stéphane Girardot
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