© 2019 Editions Delcourt

Titre : 1933
Scénariste : Rodolphe
Dessinateur : Ramón Marcos
Coloriste : Dimitri Fogolin
Éditeur : Delcourt
Collection : Histoire & histoires
Parution : Juin 2019
Prix : 14,95€

Janvier 1933. L’Allemagne s’apprête à vivre un grand changement avec la nomination d’Adolf Hitler comme nouveau chancelier. Pour la population, c’est globalement une source d’optimisme, au pire une surprise qui ne devrait pas changer grand chose au quotidien. Karl Stieg, lui, ne s’intéresse pas à la politique et cohabite paisiblement avec des voisins juifs, un collègue communiste et le sympathique restaurateur qui a renommé son établissement Chez Adolf. Pourtant, il va rapidement être confronté aux convictions nazies, avec des élèves portant l’uniforme, rejetant certains auteurs proscrits par le parti et une hiérarchie l’incitant à s’encarter pour éviter tout ennui…

« Adolf Boëcklin n’était pas le seul à avoir affiché le portrait du nouveau chancelier… Franchement, est-ce qu’il va aider à vendre des choux-fleurs… et des petites culottes? »

Avec ce premier tome, Rodolphe (A la vie, à la mort!) relate avec une grande finesse d’écriture et de narration la lente mais inexorable montée en puissance du nazisme en Allemagne, qui bouscule les habitudes et les relations entre des voisins amenés sur des voies différentes. A travers le personnage politiquement candide de Karl, il met le doigt sur les contradictions de gens ordinaires qu’une idéologie totalitaire va totalement corrompre. L’exemple du restaurateur affichant une pancarte « interdit aux Juifs » mais l’oubliant lorsqu’un habitué la remarque est significatif et habile. Cette petite histoire dans la grande explique avec clarté et simplicité la folie de l’extrémisme, mieux qu’avec de grands discours. Mais l’album bénéficie aussi du dessin sobre et réaliste de Ramón Marcos (Champs d’honneur) qui donne vie sobrement mais soigneusement à cette galerie de personnages qui sonnent juste.

Une évocation simple et efficace d’une époque trouble sombrant peu à peu dans l’horreur absurde.

Arnaud Gueury