Auteur du très atypique 13 Devil Street, Benoît Vieillard a accepté de nous parler du concept original dont il est à l’origine. Rencontre.
Bonjour Benoît, comment place-t-on un projet BD tel que le tien à une époque où tout semble assez formaté au niveau de l’édition ?
Pour ne rien te cacher c’est compliqué, d’autant plus quand ton nom n’est pas évocateur d’albums à succès… Si j’avais écouté certains éditeurs, il y a longtemps que j’aurais abandonné ce projet. Mais il faut y croire et persévérer dans ce qui nous anime. J’ai presque mis deux ans avant de faire les bonnes rencontres !
Il semblerait d’ailleurs que la pagination du second volume sera plus importante encore que le premier ?
Non, j’ai fait tout le storyboard du tome 2, en théorie la pagination sera la même (324 pages) sauf bien sûr si des idées complémentaires viennent se greffer en cours de développement…
Après avoir travaillé sur des albums plus classiques, d’où t’es venue l’idée de réaliser cette série atypique par bien des aspects ?
Je ne suis pas uniquement auteur de BD mais également graphiste indépendant, ce concept de livre « Maison » est plus une approche de graphiste que de dessinateur. Mon métier premier est de manipuler le papier. Les supports de com’ que je crée pour certains de mes clients sont souvent avec des pliages, des découpages que j’affectionne tout particulièrement. J’adorerais un jour faire une BD en pop-up !
Quelle est la principale difficulté à réaliser un album de ce genre ?
La difficulté pour moi est au niveau de la construction, le scénario doit être parfaitement préparé et organisé en amont… On est toujours sur le fil du rasoir avec ce genre d’intrigue, il faut être rigoureux et penser à tous les tenants et les aboutissants de l’histoire, tout doit s’imbriquer comme dans une horloge !
Un storyboard de cette série, ça ressemble à quoi ?
C’est assez simple, je dessine sur un format A3 l’ensemble d’une double-page, c’est-à-dire l’immeuble tout entier en coupe sans les personnages. Puis je photocopie ce dessin en X exemplaires en atténuant les contrastes (-50%). Enfin je crayonne mes personnages sur ces photocopies, page après page en y collant les bulles et mes dialogues… Progressivement le storyboard se forme.
Le fait que l’espace dans les planches soit utilisé identiquement tout au long de l’album te permet un gain de temps dans la réalisation de l’album. Combien de temps t’a-t-il fallu pour réaliser le tome 1 par rapport aux précédents albums que tu as dessiné ?
Effectivement, je ne refais pas à chaque page le décor mais il y a tout de même des variantes de couleurs et de lumières en fonction de la journée et des actes. Je mets à peu près un an et demi pour réaliser un album comme celui-ci. L’écriture du scénario est particulière car il y a plusieurs histoires qui se déroulent en même temps. Je suis donc obligé d’écrire mon déroulé sous forme de tableau à double entrée. Avec d’un côté les personnages et de l’autre les étages. C’est indispensable pour avoir les idées claires et éviter les incohérences.
Penses-tu que ce genre de BD peut se développer ou est-ce que cela restera selon toi très rare ?
J’espère bien que cela va se développer, en tout cas je ne compte pas m’arrêter en si bon chemin. Ce n’est pas le tout d’être original, il faut que cela ait du sens pour le public. C’est bien parti, le premier tome de 13 Devil Street vient d’être réédité, c’est une très bonne nouvelle, ça prouve que les lecteurs aiment être surpris !
Avoir réussi à placer un tel projet est gage d’espoir pour les auteurs aux projets originaux qui galèrent ?
L’espoir donne du courage, il est vrai qu’il est de plus en plus difficile de se faire éditer, le chemin est long… 13 Devil Street a mis deux à trois ans avant de trouver sa maison. Il ne faut jamais perdre espoir. Généralement les éditeurs hésitent lorsqu’ils rencontrent un dossier atypique car celui-ci ne rentre pas dans leurs critères, propres à chaque maison d’édition. Mais il y a des petites maisons qui osent comme Filidalo… Je les en remercie. Merci de leur confiance !
Pour conclure, peux-tu nous en dire plus sur ce qui nous attend dans le second volet de ta série ?
Le tome 2 n’est pas une suite du premier, c’est une autre aventure qui se déroulera toujours au 13 Devil Street mais en 1940. Le contexte n’est plus le même. En 1888, nous avions les horreurs perpétrées par Jack l’éventreur et ici nous aurons les horreurs de la 2ème Guerre Mondiale. Donc, sur fond de Blitzkrieg, le 13 va revivre des jours sombres et angoissants. Celui-ci est devenu un hôtel qui reçoit certaines célébrités de l’époque telles que Winston Churchill, Marlène Dietrich et même le Général De Gaulle… tout un programme ! Il va falloir patienter un peu car l’album sortira dans un an, fin 2017.
Merci à toi d’avoir répondu à nos questions.
Propos recueillis par Nicolas Vadeau.
Interview réalisée le 2 décembre 2016.
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