
© 2018 Rue de Sèvres
Titre : Vies volées – Buenos Aires, Place de Mai
Scénariste : Matz
Dessinatrice – Coloriste : Mayalen Goust
Éditeur : Rue de Sèvres
Parution : Janvier 2018
Prix : 15€
Depuis tout petit, Mario se sent étranger à sa famille. Sa couleur de cheveux, les secrets sur sa naissance, tout l’amène à croire qu’il a été adopté. Pire, il pense être un enfant volé par la dictature militaire argentine. Mais le combat des grand-mères de la Place de Mai à Buenos Aires, constant depuis la fin des années 70, permet, par des recherches ADN, de reconstituer des familles. Par amitié et pour les beaux yeux d’une jeune infirmière, son ami Santiago l’accompagne à la clinique. Quelques jours plus tard, le résultat est sans appel. Mario est bien le fils de ses parents. Mais pas Santiago…
« Tristesse? Une honte, tu veux dire! Voler des enfants à leur famille! Qui fait ça dans une pays civilisé? Non, moi je te le dis, mon garçon, ce pays est un cauchemar, et tu devrais aller chercher fortune ailleurs! »
Ce formidable album est un excellent moyen de découvrir, à travers l’histoire fictive mais très proche de la réalité de centaines de jeunes Argentins, le combat admirable et permanent des « Grands-mères de la place de Mai », une ONG qui a défié la dictature dès 1977 pour découvrir le sort réservé à leurs enfants, les tristement célèbres « desaparecidos », de jeunes opposants enlevés sans laisser de trace ni d’espoir, et leurs petits-enfants, souvent confiés aux proches du régime. Matz parvient à synthétiser tous ces éléments dans un récit plein de tact et de pudeur, mais sans édulcorer une page très noire qui touche des milliers de familles et continue son oeuvre destructrice quatre décennies plus tard. Pour contrebalancer le drame des personnages, Mayalen Goust use d’un trait fin, à la fois fort et sensible qui compte pour beaucoup dans la réussite de cette bande dessinée éminemment touchante.
Un album lumineux et tragique, porteur d’espoir et d’un passé étouffant.
Arnaud Gueury
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