
© Casterman
Titre : La Vallée du Diable
Scénariste – Dessinateur – Coloriste : Anthony Pastor
Éditeur : Casterman
Parution : Août 2017
Prix : 20€
Florentin, Blanca, Pauline et Arpin débarquent au port de Sydney après avoir quitté le sol français pour diverses raisons propres à chacun, au lendemain de la première guerre mondiale. Sur les quais, ils font la connaissance de James Jacques, un Franco-Australien, et sa fille Marie. Ce dernier est interpellé par la petite troupe venant de Savoie, ce qu’il trouve exotique, et leur parle de Grande-Terre, la plus grande île de Nouvelle-Calédonie, où il peut leur fournir un abri et du travail. Cinq ans se sont écoulés, Florentin travaille avec Auguste, un kanak, le meilleur stockman de l’exploitation Jacques, et va bientôt être contremaître, Pauline a épousé – au grand dam de James – Arpin qui lui travaille dans les mines et s’absente pendant de longues périodes, Marie quant à elle aime Florentin – ce qui n’est pas réciproque – et Blanca prend de plus en plus part pour la cause des indigènes. Leurs rêves de justice sociale et de liberté ne sont pas vraiment au rendez-vous, d’autant plus que le contexte ne s’y prête pas. En effet, entre les libérés, le racisme, l’esprit colonialiste, le code de indigénat et les violences subies par les autochtones, les tensions montent entre blancs et kanaks. Sans compter les imbroglios sentimentaux, et ce jusqu’au point de non-retour…
La Vallée du Diable peut être considéré comme la suite du Sentier des Reines puisqu’il raconte la suite du « road trip » de personnages qu’Anthony Pastor (Ice Cream) transporte dans un contexte complètement différent. Cependant, on peut le lire comme un one shot. L’auteur concentre ses attentions sur les relations amoureuses et sentimentales qui existent entre les protagonistes avec en toile de fond le colonialisme et des situations sociale et économique très tendues. Les conflits s’exacerbent entre eux pour aboutir à un climax assez violent porté par une tempête qui s’abat sur l’île. L’ensemble est très bien équilibré – découpé en trois chapitres et un épilogue – et donne une histoire à la fois passionnante et instructive. La partie Histoire est d’ailleurs bien complétée par un dossier de quatre pages réalisé par Isabelle Merle, historienne au CNRS. Un éclairage judicieux sur de nombreux points comme les colons pénaux ou libres, Koné – un centre de colonisation dit libre qui a inspiré Anthony Pastor et l’a renommée Banoa pour plus de liberté de création – ou encore le code de l’indigénat. Graphiquement, le rendu est en parfaite symbiose avec le récit. Un trait très réaliste à base de hachures déclinées de manières différentes en fonction des scènes d’action ou celles plus contemplatives. Le travail de mise en couleurs n’est pas en reste et dégage les ambiances voulues par les intentions scénaristiques.
Un très bel album qui éclaire les relations tumultueuses et contemporaines entre la France et la Nouvelle-Calédonie.
Stéphane Girardot
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