Titre : Chamisso, l’homme qui a perdu son ombre
Scénariste : David Vandermeulen
Dessinateur : Daniel Casanave
Coloriste : Patrice Larcenet
Éditeur : Le Lombard
Parution : Mars 2014
Prix : 22,50€
La déveine est un mot qu’Adelbert Von Chamisso connait bien, sans aucunement l’affectionner, car elle ne l’a quasiment jamais quitté depuis sa jeunesse et son départ forcé du château de Boncourt, à l’âge de dix ans, pour l’Allemagne, sous La Terreur. Celui qui, comme son amie Rahel, s’identifiait à un Schlemihl (mot yiddish signifiant déveinard), a toujours eu un mal-être identitaire. Pensez-vous, ce poète romantique, à la double nationalité franco-allemande, ne s’est jamais trouvé au bon endroit au bon moment par rapport à sa condition. Cependant, c’est en mars 1814, il y a précisément deux cents ans, que Chamisso écrivait un des textes les plus emblématiques de la littérature allemande. Il s’agit du conte romantique Peter Schlemihl, l’homme qui a perdu son ombre. Assez paradoxal pour un Français né en Champagne. Dès lors, laissez-vous porter par son incroyable histoire.
On pourrait croire que le mélange entre la biographie d’un des poètes romantiques les plus malchanceux qui puissent exister et un de ses récits autobiographiques soit d’un profond ennui. Que nenni ! En effet, cette idée de base de la série Romantica, dont Chamisso, l’homme qui a perdu son ombre est le deuxième opus, est très originale et surtout très instructive. La manière et le ton avec lesquels David Vandermeulen (Fritz Haber) l’aborde rend l’ensemble tout à fait passionnant et des plus attrayants. On sent au fil des pages monter une irrépressible envie d’en savoir plus et d’aller à la découverte de ce poète franco-allemand que le scénariste rend incroyablement attachant. Paradoxalement, la richesse des recherches retranscrites ne nuisent, à aucun moment, à la fluidité du récit, bien au contraire. Le texte est immersif tout autant que peut l’être le dessin de Daniel Casanave (Villain, l’homme qui tua Jaurès). De fait, le dessinateur nous plonge dans de superbes décors qu’il maîtrise parfaitement car ce sont ceux de son enfance. La dynamique de son graphisme, associée aux couleurs romantiques de Patrice Larcenet, est en symbiose totale avec les textes. Pour finir, disons que Chamisso est une œuvre très réussie qui se love dans un très bel écrin au format à l’italienne, avec son singulier marque-page en soie façon Pléiade.
Une très belle découverte, à la fois divertissante et enrichissante, portée avec brio par des auteurs en parfait accord.
Stéphane Girardot
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2 Responses à “Romantica #2”