Titre : Miss Kelly Penny
Scénariste : Crisse
Dessinateur – Coloriste : Christian Paty
Éditeur : Soleil
Parution : Mars 2022
Prix : 14,95€
Alors que les animaux ruminent contre leur enfermement et le manque d’herbe fraiche, ainsi que contre les lumières omniprésentes et cet étrange sourire qu’arborent tous les humains, c’est Noël à Killkenny. La neige a même fait son apparition pour embellir la crèche reconstituée près de l’église. Le curé profite alors de la messe rassemblant ses ouailles pour présenter la nouvelle institutrice venue de Dublin, une beauté rousse qui fait chavirer les hommes et enrager leurs épouses. Malgré sa gentillesse, sa présence va raviver un vieux souvenir douloureux et une légende vivace, tandis que l’agneau de la crèche va accomplir des miracles et relancer une crise mystique chez les impressionnables moutons…
« Il y a une nouvelle humaine dans le village des hommes… et elle est bien étrange. Je sens que notre tranquillité va bientôt être bouleversée. »
Quelle merveille ! Le premier tome avait déjà été une agréable surprise, mais cette suite le surpasse en tout point. Si l’histoire reste plutôt classique dans son déroulement, cette peinture d’un austère mais sympathique petit village irlandais est si crédible et touchante qu’on croirait le connaître, avec sa galerie de bons bougres un peu sauvages mais sans vraie méchanceté. Crisse croque cette ambiance avec beaucoup de subtilité et de justesse, avec beaucoup d’amour pour ces personnages imparfaits sans qui le récit ne serait rien. Mais sa belle trouvaille est d’imaginer une aventure parallèle pour les animaux du pré, confrontés au calendrier des humains et à celui de la nature, sans rien y comprendre, ce qui permet de les laisser s’imaginer des choses terribles et hilarantes. Toujours sous le regard de l’écureuil et du hibou, les plus lucides de la bande, ces deux mondes s’entrechoquent et cohabitent au cœur d’une histoire sublimée – le mot est faible – par le dessin magnifique de Christian Paty. Alors que son style a beaucoup évolué ces derniers temps, cet album est sans doute le plus beau qu’il ait jamais réalisé. L’exercice est pourtant difficile car il faut réinventer un village irlandais reculé dont l’ambiance particulière est pourtant immédiatement palpable, ou brosser une série d’animaux légèrement humanisés puisqu’ils parlent entre eux. Mais tout est parfait, des décors à l’atmosphère de l’hiver, en passant par les habitants finement caricaturés ou l’institutrice à la beauté renversante.
Un album fabuleux par son dessin et sa colorisation comme par son ton et son message humaniste.
Arnaud Gueury
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Une réponse à “Pré derrière l’église (Le) #2”