
© 2016 Le Lombard
Titre : Perceval
Scénariste – Coloriste : Anne-Caroline Pandolfo
Dessinateur – Coloriste : Terkel Risbjerg
Éditeur : Le Lombard
Parution : Octobre 2016
Prix : 19,99€
Dans la forêt perdue où il vit seul avec sa mère, un jeune homme à l’allure belle se rend à dos de cerf au lac pour prendre un bain. Une pie persifleuse l’aborde et l’incite à se rendre au-delà des grands pins pour découvrir d’autres horizons. Il sait qu’il ne doit pas dépasser cette limite selon les recommandations maternelles mais, malgré les rappels à l’ordre de ses compagnons de la sylve, il se laisse tenter et tombe nez à nez avec des êtres qu’il prend pour des anges aux habits brillants, comme s’ils étaient revêtus d’un lac. Il s’agit en fait de chevaliers de la Table Ronde menés par Gornemant de Goort. Fasciné par cette vision, il prend alors la décision de devenir un des leurs. Sa mère essaye de l’en dissuader en lui dévoilant l’histoire de son père, un roi qui ne craignait rien et défia le Malin lui-même. Gravement blessé au bas ventre, il périt de chagrin après la disparition de ses deux autres fils. Ni ce récit, ni l’ours, la chouette, le cerf, le renard ou encore le lapin, ne l’arrêtent et il part pour Carduel à la rencontre du Roi Arthur, laissant sa mère tombée en pâmoison. Le jeune homme ne connait pas son nom mais désormais il a un rêve !
Perceval, c’est juste magnifique ! Un régal narratif autant que graphique. Lecteur, que tu sois amateur de légendes arthuriennes ou pas, tu dois lire ce roman graphique de presque 180 pages. Cet album est librement inspiré du Perceval ou Le Conte du Graal de Chrétien de Troyes – une œuvre inachevée – que l’on situe vers 1180 et en offre ainsi une nouvelle lecture. Anne-Caroline Pandolfo (L’Astragale) a pris le parti de laisser de côté les passages développés autour de Gauvain pour se concentrer uniquement sur la quête initiatique et identitaire de Perceval qui, ici, ne connait pas son nom. Seule la psychologie du héros est au premier plan. Bien sûr, les personnages comme le Roi Arthur, le Roi Pêcheur et Blanchefleur entre autres sont bien présents. Tout comme il est aussi question du Graal. La scénariste prend donc un certain nombre de libertés dont celle de mettre plus de magie et de fantastique que dans le manuscrit originel – avec les fantômes, les démons, les animaux parlants – pour accentuer les références aux légendes arthuriennes tout autant que les ambiances inhérentes. D’ailleurs, la pie persifleuse n’est autre qu’une « métaphore visuelle » de la conscience de Perceval qui ne le quitte à aucun moment durant le récit. Une prouesse scénaristique dont les résultats sont une immersion totale et une évasion complète dans l’espace-temps. Des sentiments largement exacerbés par le graphisme ainsi que la mise en page extrêmement audacieux et frappants de Terkel Risjberg (La Lionne), tout comme son dessin assez rond bien mis en valeur par de beaux aplats réalisés à quatre mains par les deux auteurs, ainsi que la forme arrondie voire ovoïde des cases qui ajoutent à la rêverie. De plus, la manière dont sont traités les flash-backs est un beau clin d’œil aux procédés du Moyen-Âge puisque l’auteur les illustre sous forme d’enluminures. Une belle couverture au titre embossé, une tranchefile rouge et un signet assorti offrent une finition parfaite à l’écrin de cette perle d’aventure.
Comment ne pas être dithyrambique devant une bande dessinée de cette qualité ! A lire et à partager sans aucune hésitation.
Stéphane Girardot
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