Titre : Tome 1
Scénariste : Alejandro Jodorowsky
Dessinateur – Coloriste : François Boucq
Éditeur : Le Lombard
Parution : Novembre 2018
Prix : 22,50€
L’île de Damanuestra se prépare une nouvelle fois à affronter une vague gigantesque. Alors que le raz-de-marée est tout proche, la population désormais habituée à ce genre de catastrophe se dirige vers les abris afin de se protéger. L’état dictatorial dirigé de façon tyrannique par les Kondukators, Oscar et Lili Lazo, est parfaitement organisé pour cela et en profite pour libérer de ses geôles et livrer à la fureur des éléments tous les opposants au régime. Moralement déviant, l’archipel a également une spiritualité viciée par le clergé à des fins politiques. En attendant la fin du déferlement aqueux, un phénomène vient inquiéter Monseigneur Groïssman. En effet, son Éminence voit – via les caméras de surveillance – un étrange personnage sans visage dansant sur la falaise face à la vague qui s’ouvre devant lui. Comme s’il la contrôlait. Le Kondukator ordonne qu’on lui amène l’agitateur sur le champ. Cependant, avant de lui mettre la main dessus, Face de lune, sous la protection d’Isha qui, elle, l’appelle Borrado, redonne de l’espoir à tous ceux qu’il croise sur son chemin sans le savoir et le vouloir. Son objectif n’est connu que de lui seul, si tant est qu’il en ait un. Quoi qu’il en soit, la révolte des rebelles n’attendait qu’un signe… qu’un messie pour commencer.
Cette série mythique qui a vu le jour dans le légendaire magazine (À Suivre) est la première collaboration entre Alejandro Jodorowsky et François Boucq, qui se retrouveront plus tard pour réaliser Bouncer. La présente intégrale sous couvertures inédites reprend l’album La Cathédrale invisible sous sa forme originelle. En effet, après une première édition en 1992 chez Casterman, l’éditeur avait réimprimé le volume en deux parties (Le Dompteur de vagues et La Cathédrale invisible) en 2003 avec une coupure située entre les pages 84 et 85. Les éditions du Lombard nous offrent en cette fin d’année l’occasion de (re)découvrir le début de cette aventure, sans les modifications apportées alors, où les propos crus, spirituels, métaphysiques et les aspects charnels inhérents aux créations du scénariste sont déjà bien présents. Avec un peu de recul, le lecteur pourra y voir une critique visionnaire de notre société actuelle via la révolte des basses classes, le mépris des dirigeants à l’égard du peuple, les accointances entre politiques et clergé, les manigances de tous bords, les mœurs légères de la population de cette belle « République Ovarienne » ou encore la course à l’armement avec le Totrane. Cette fable extraordinaire trouve d’ailleurs une résonance parfaite dans le trait et la mise en couleurs de François Boucq qui a relevé un défi en dessinant un personnage sans visage et muet. Jusque-là, c’est à ce niveau que l’auteur concentrait la quintessence de ses protagonistes. Et c’est réussi car Face de lune est des plus expressifs ! Il y a beaucoup de belles planches mais la double-page où la vague est sur l’île de Damanuestra et celle de « la goutte d’énergie tellurique » sont à tomber. De plus, cet objet-livre à la maquette très soignée propose en introduction un dossier d’une trentaine de pages qui aborde la genèse du récit nous permettant ainsi de l’aborder d’une toute autre manière.
Une très belle et bienvenue réédition qui fera plus d’un heureux !
Stéphane Girardot
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