Titre : Tome 3
Scénariste – Dessinateur – Coloriste : Ludovic Debeurme
Éditeur : Casterman
Parution : Septembre 2019
Prix : 23€
Koji et son père David croyaient prendre la bonne décision en dénonçant les Epiphanians. Ils pensaient que leur vie serait sauve mais, au lieu de cela, les humains leur ont réservé le sort dont font habituellement l’objet les mauvaises herbes, brûlées au lance-flammes. De ses amis, seul Vespero en réchappa. Koji attend son procès avec ce poids sur la conscience et avec l’idée que ce ne sont pas uniquement quelques mixbodies qui seront jugés mais toute une race. La sentence est prononcée : c’est la peine de mort. David, ne pouvant se résoudre à perdre son fils et se sentant coupable également, le fait évader, ainsi que Hard Bee, non sans verser le sang. Vespero, qui a pisté le père de Koji, les retrouve réunis, bien décidé à éliminer les coupables de cette véritable boucherie. Alors que les trois Epiphanians se battent âprement, une nouvelle Vague submerge la ville. Une fois l’eau retirée des rues, des géants – les Organics, les Lithos et les Metalics – et des semi-géants sortent de terre, de la mer et détruisent toutes les villes à fort P.I.B., en prenant bien soin d’éviter les forêts et les zones les plus pauvres. En quelques souffles, cette armée de métal, de bois, de pierre et de boue réalise ce que les Epiphanians ne sont pas arrivés à faire. Est-ce la fin du monde ou la fin d’un monde ?
Ludovic Debeurme achève sa trilogie dystopique avec ce troisième tome de plus de 130 pages, très engagé politiquement, qui éclabousse tel un gros pavé jeté dans la mare. À l’instar de Greta Thunberg, l’auteur est tout à fait conscient des méfaits de l’économie ultralibérale appliquée par les politiques qui crée des désirs poussant l’Homme à combler des vides inutiles et aboutissent, au lieu de créer le bien-être pour le plus grand nombre, aux urgences sociétales et environnementales que nous connaissons malheureusement aujourd’hui. Là est le message lancé derrière cette série de science-fiction depuis le début. À grand renfort de poésie et d’onirisme, Ludovic Debeurme propose une solution où chacun doit se réinventer individuellement puis collectivement afin de sortir de cette décadence mortifère dans laquelle est engagé notre monde. Une inspiration où la psychanalyse et la Littérature apportent une matière créatrice prégnante. C’est non sans une certaine ironie que l’on voit les pays attaqués par les géants se réfugier vers les pays plus pauvres qu’ils ont exploités pendant des années et qui leur ferment les frontières. Ou encore la tentative avortée d’extraction, via un projet spatial secret, des 376 personnalités les plus influentes et riches du monde dans le but d’attendre dans la stratosphère que la situation redevienne viable, sans prendre de risques. Graphiquement, l’interprétation de ce conte est dans la somptueuse et habituelle lignée esthétique du dessinateur. Avec des découpages différents et originaux ainsi qu’une palette graphique très personnelle, les propos sont véhiculés de la plus belle des manières.
Un message fort, engagé et clair, délivré par le truchement d’une magnifique trilogie que fera date dans la monde du 9ème Art. À lire absolument !
Stéphane Girardot
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