© 2022 Casterman

• Titre(s) : La Dernière reine
• Scénariste(s) - Dessinateur(s) - Coloriste(s) : Jean-Marc Rochette
• Editeur(s) : Casterman
• Parution : Octobre 2022
• Prix : 30,00 €
• EAN : 9782203208353

Gueule cassée de la guerre 14-18, Édouard Roux se balade toujours avec un sac sur la tête et passe son temps à boire. Un soir, Maurice, le fils de sa voisine de palier, l’aide à ouvrir sa porte et lui parle tout naturellement de son oncle, gueule cassée lui aussi, car ce dernier connaît quelqu’un qui refait les visages. L’enfant du Vercors fait ainsi la connaissance de Jeanne Sauvage, sculptrice animalière, et trouve refuge dans son atelier de la butte Montmartre. Elle lui redonne un visage et l’introduit auprès de son groupe d’amis artistes. Édouard, qui se sent redevable, d’autant plus qu’elle ne lui a rien fait payer pour son art, propose à Jeanne de découvrir la beauté du plateau de son pays natal et lui raconte l’histoire du dernier ours du Vercors, abattu devant ses yeux en 1898. Il lui dévoile même la “Dernière reine”, lovée au cœur du cirque d’Archiane, afin qu’elle crée le chef d’œuvre qui la fera reconnaître comme une grande artiste. Une magnifique histoire d’amour entre un homme et une femme… entre l’Homme et la nature !

Ce qui est extraordinaire dans toutes les œuvres de Jean-Marc Rochette (Ailefroide), c’est de retrouver tout cet amour, cette force et ce supplément d’âme qui font qu’à chaque fois nous sommes transportés, immergés, tourneboulés et touchés par ses récits et leurs retranscriptions graphiques dès les premières planches, voire dès la couverture. Avec La Dernière reine, on atteint des sommets. Tout nous explose au visage. C’est un véritable chef d’œuvre ! Dès la première séquence, l’auteur nous indique comment cela va se terminer. Mais, avec une maestria sans égale, Jean-Marc Rochette nous le fait oublier. Tout simplement parce qu’il nous pose aux premières loges d’une singulière et magnifique histoire d’amour entre une gueule cassée et une sculptrice animalière, deux êtres que tout oppose. Leur relation est alimentée par une autre romance, celle entre Édouard et la nature au sens large du terme (le plateau du Vercors, les animaux et l’ours en particulier) qu’il partage avec Jeanne pour son plus grand bonheur. Malheureusement, tous deux sont victimes d’injustices qui font naître en nous compassion pour le couple et colère envers le galeriste qui vole l’artiste et ceux qui ne comprennent pas Édouard, et cela depuis tout petit. Que dire du décor, des paysages ? Littéralement, l’ensemble constitue un personnage à part entière qui nous émerveille. Tout y est juste car l’illustrateur connaît les montagnes par cœur. Son trait charbonné et sa mise en couleurs, si personnels, parachève un tableau déjà parfait par bien des aspects.

Sans aucun doute, “le” chef d’œuvre de Jean-Marc Rochette !

Stéphane Girardot