Auteur auto-édité, Jas parcourt les festivals de France depuis de nombreuses années et nous avons eu l’occasion de le croiser à maintes reprises. Nous avons souhaité lui poser quelques questions. Rencontre.
Bonjour Jas. Voilà 14 ans, tu te lançais dans l’auto-édition.
Bonjour Nicolas. Eh oui 14 ans déjà, le temps passe. J’ai débuté l’auto-édition en même temps que l’ami François Plisson en avril 2005, évidemment en plus de sa longue carrière éditée.
Qu’est-ce qui t’a donné envie de te lancer dans cette aventure ?
Il y a 20 ans, je montais sur Paris pour trouver du travail et pour proposer mes créations Néris le hérisson, Jacques Riffeur et plus tard Choupette. Démarchant 250 éditeurs sans succès, dès que j’en ai eu l’opportunité, je me suis décidé à produire mon premier album. Ayant eu la chance de vivre à Blois, avec le festival de BD Boum, cela m’a permis de rencontrer des auteurs et notamment des auto-édités. À l’époque, Bruno Bertin, Joël Azara, Duf. Je savais que cela restait une solution pour pouvoir m’exprimer et rencontrer mon lectorat. Néanmoins, je reste ouvert à toute proposition avec un éditeur, c’est toujours un tremplin pour une série BD. Parallèlement, j’ai illustré des livres pédagogiques pour le groupe Nathan. Dernièrement, Néris le hérisson est paru pour la publication du journal Tu savais pas, une très belle collaboration avec David Volpi. 100% des bénéfices sont reversés au sanctuaire du hérisson. Tout comme l’ami Guillaume Delacour, je fais également parti du collectif de la Lanterne à BD, de nombreux projets BD sont en cours…
Néris le hérisson a été ta première série, y a-t-il une raison particulière pour avoir choisi cet animal comme personnage principal ?
Au début, Néris le hérisson est né d’un moment de doute. Je me suis dit que je n’arriverais jamais à bien dessiner des personnages humains en bande dessinée. L’idée m’est venue de dessiner un animal. Le chat, le chien, la souris… c’était du déjà vu mais pas le hérisson. C’est en lisant les gags de Poussy de Peyo que j’ai eu envie d’aborder la narration en demi-format et aussi de concevoir de la bande dessinée sans texte. Une dizaine de pages furent publiées dans un fanzine Blésois, le Splogopft, avec François Coulaud. Bien avant Néris, j’avais dessiné une aventure de Jacques Riffeur, L’Etoile Bleue, qui parle et dénonce les mouvements sectaires. C’est pour diminuer les coûts d’impression que sont d’abord parus les albums de Néris en demi-format à l’italienne. Cinq albums sont sortis dans ce format. Les trois premiers ont été réédités dans une version cartonnée. C’était l’occasion d’apporter un petit coup de jeune en modifiant certains dessins et couleurs. Les Aventures de Néris le hérisson, Mes premières histoires précèdent désormais la série. Mon personnage est devenu, au fil des années, un petit héros du développement durable.
La série s’est internationalisée puisqu’avec Néris il est possible depuis quelques années d’initier son enfant à l’anglais. Salima, ta conjointe, collabore avec toi sur ce titre.
Tout à fait, c’est la collection Découvrir et comprendre, avec Néris découvre les journées mondiales et Néris découvre l’anglais. Nous avions envie de créer un livre d’initiation à la langue anglaise, ce qui nous a permis de collaborer et de dédicacer ensemble. C’est une vraie surprise pour nous de voir le succès auprès des enfants et des parents qui ne sont pas forcément lecteurs de bandes dessinées. Nous pensons travailler de nouveau ensemble sur des projets, sans doute de livres illustrés, peut-être une adaptation de Néris et les monstres de la forêt en anglais.
Qu’en est-il de Jacques Riffeur, ton autre série ?
Il est vrai que le petit hérisson m’a pris du temps mais je voulais vraiment bien développer la série. Je compte réimprimer les aventures de Jacques Riffeur. Et je travaille déjà sur une nouvelle aventure, j’ai d’ailleurs quelques idées mais encore rien de vraiment concret.
En parallèle des festivals BD auxquels tu participes, tu réalises également des interventions scolaires.
C’est le prolongement de notre travail d’auteur, d’amener le goût de la lecture de partager notre passion. C’est la seule façon que nous avons de faire vivre le livre et d’apporter l’envie de créer.
C’est quelque chose d’important pour un auteur auto-édité de faire connaître son travail par ce biais ?
Lors de mes interventions, se passant généralement en classe découverte, en centre de loisirs, en médiathèque et en classe, je présente mon travail d’auteur et les étapes de la réalisation d’un album. Mon but est que chaque participant réalise une bande dessinée. C’est seulement dans un cadre d’une dédicace éventuelle que l’on découvre véritablement ma série. Par principe, je ne mélange pas l’atelier BD et la vente d’albums.
Penses-tu que l’avenir de la BD passera par l’auto-édition ?
C’est sans doute inévitable, tout comme la musique et les labels indépendants, je pense que c’est le moyen d’apporter une grande richesse de créativité, de voir d’autres réalisations non formatées, en nombre de pages, de style… C’est l’occasion de redécouvrir des auteurs qui n’ont plus d’éditeur et qui continuent de partager leur passion et leur création.
Quel regard portes-tu sur tes quatorze années de carrière ?
Je remercie mes lecteurs d’être présents depuis 14 ans. J’ai la chance d’être toujours là. Beaucoup de collègues auteurs ont dû arrêter le métier car ils n’y arrivaient plus financièrement ou faute de projets validés par des éditeurs. Notre métier est très difficile, nous devons garder un rythme de travail constant et journalier. Je dessine souvent en atelier virtuel avec les amis Philippe Larbier, Christophe Lazé, Bob Bergé, Guillaume Albin, Olivier TaDuc… c’est une grande motivation. Et bien sûr l’ami Bad qui a toujours de précieux conseils notamment pour mes couvertures d’albums. Je pense également à ma Salima et aux amis qui me relisent, dont Spooky. En auto-édition, Salima et moi travaillons sans trop rien gagner et en investissant constamment pour faire des albums. Beaucoup de salons nous sont fermés ou nous demandent de payer la place, ce que j’ai souvent refusé. Nous ne sommes pas des marchands de livres mais des auteurs à part entière. Certains festivals sont devenus au fil du temps notre seconde famille : Crespières, Les bulles en balades, Therain de bulles, La neuvième BD, Marines, Gretz, les Courants, La Baule… Il suffit de nous suivre en salon pour comprendre l’enthousiasme et la générosité des organisateurs passionnés. Heureusement qu’ils sont là. Je ne vis pas de l’auto-édition mais des interventions BD. C’est grâce à l’auto-édition que j’ai pu accomplir mon rêve d’être auteur dessinateur de bande dessinée et de pouvoir être parmi vous aujourd’hui.
Prêt à repartir pour quatorze années supplémentaires ?
Bien sûr, si la santé me le permet et si j’arrive encore à intéresser. J’ai encore beaucoup de chose à raconter.
Quels sont tes projets pour 2020 ?
Un album Néris le hérisson découvre les chiffres et les lettres en préparation. Je travaille sur la prochaine aventure de Néris le hérisson, L’étrange rencontre qui aborde la problématique des déchets et la pollution du plastique. Ainsi qu’un cinquième album du hérisson sur la cause animale pour 2021/2022.
Pour conclure, si tu avais un conseil à donner à une personne qui souhaite se lancer dans l’auto-édition, ce serait quoi ?
C’est agréable de voir de jeunes auteurs se lancer en auto-édition. J’ai pu voir dernièrement Roi de trèfle et Seriba, des auteurs prometteurs. Je donne toujours les mêmes conseils :
– prendre le temps de faire un album
– ne pas le produire en trop grande quantité pour commencer
– utiliser le site OpaleBD de l’ami Bruno Lemaitre
– bien travailler la présentation des albums sur sa table.
Merci à toi !
Merci et au plaisir de vous retrouvez en salon et en attendant, rendez-vous sur mon site http://jas.bd.free.fr
Propos recueillis par Nicolas Vadeau
Interview réalisée le 2 janvier 2020.
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