
Alors que Jérôme K. Jérôme Bloche, son héros, fête cette année les 35 ans de sa première édition BD (après quelques années passées dans les pages de Spirou), nous avons profité du passage de son créateur, Alain Dodier, au festival international de la bande dessinée d’Angoulême pour lui poser quelques questions.
Bonjour ! Je tenais à vous interviewer aujourd’hui car, étant angoumoisine, je viens au festival depuis très longtemps et la toute première BD que j’ai faite dédicacer il y a 25 ans était le tome 3 de Jérôme K. Jérôme Bloche !
Ah bon ?
Oui oui. Du coup forcément ce tome est un peu particulier pour moi. Je voulais donc savoir si vous aviez vous-même un tome préféré ?
Celui que je préfère est celui que je vais faire demain. Là je viens de terminer le scénario du 28ème dont pour l’instant le titre semblerait être La Louve dans la bergerie et je commence à dessiner dès que je rentre d’Angoulême.
Et où trouvez-vous vos idées ?
Si vous avez la recette, je suis preneur ! Ça me vient parce que je cherche et finalement, à force de chercher, on finit par trouver si on cherche avec beaucoup d’imagination et beaucoup de ferveur. Il faut que ce soit son métier peut-être et une grande opiniâtreté. Je ne vous cache pas qu’à chaque nouvelle histoire, la première semaine j’ai des doutes. Je me dis « ça y est c’est fini, je ne trouverai plus jamais ». Alors il y a aussi les notes que je prends depuis une trentaine d’années, un peu des faits divers que je glane par-ci par-là et je dirais surtout la vie, la mienne, mon rapport avec les gens. Et puis finalement ce n’est pas vraiment une série policière, c’est des rapports entre les gens qui sont souvent plutôt compliqués.
Vous n’avez jamais eu envie de faire autre chose que Jérôme K. Jérôme Bloche ?
Jamais !
Aucune envie d’arrêter ?
Jamais ! Parce que c’est une histoire contemporaine, qui se passe à notre époque et que je fais depuis près de 40 ans. Donc ça veut dire que notre époque depuis 40 ans, ça a beau être notre époque, ça change tout le temps. Dans 10 ans, j’espère encore en faire si ma santé est là et ça sera toujours notre époque, mais je ne peux pas imaginer ce que ce sera dans 10 ans ! Comment se lasser de quelque chose qui change tout le temps ?
Jérôme ne vieillit pas beaucoup…
C’est un héros, qu’on le veuille ou non, il ne change pas. C’est un point de repère pour le lecteur et c’est d’ailleurs tout le paradoxe d’un quotidien qui change et d’un personnage qui ne change pas.
Sa relation avec Babette a évolué un peu…
Ça évolue légèrement… c’est vrai qu’en presque 40 ans ça a évolué l’équivalent d’une vie normale en six mois.
Quand vous avez commencé, est-ce que vous pensiez presque 40 ans après être toujours en train de raconter les histoires de Jérôme ?
Non. On ne pense à rien quand on commence. On est déjà très content de placer une histoire dans Spirou, qu’on nous accepte la seconde, que la troisième soit attendue et qu’à la quatrième ça semble faire partie des meubles. On met juste un pied devant l’autre.
Ça vous prend combien de temps pour faire une BD entière ?
Alors j’ai remarqué un truc curieux depuis que je fais du scénario depuis une trentaine d’années, c’est que je mets toujours quatre mois à l’écrire. Je ne peux pas expliquer pourquoi, doute ou pas doute, difficulté ou pas difficulté, quels que soient les obstacles que je rencontre, finalement quand je mets le mot fin à mon scénario il s’est passé quatre mois. Avant je ne me souviens plus comment je bossais, mais maintenant je sais que depuis quelques années je mets une semaine par page à la dessiner. Mes histoires font 70 pages donc 70 semaines. Plus les quatre mois du scénario, je vous laisse faire le calcul !
Ce n’est pas si long que ça finalement ?
Non c’est vrai.
Vous aviez une séance de dédicace ce matin. On vient souvent vous voir en dédicace ?
Oui. Ce qui m’a été agréable aujourd’hui c’est que ce n’était que des nouvelles têtes. Dans les festivals, on rencontre souvent des gens que l’on a l’habitude de voir, on les connaît pratiquement par leur prénom. Mais là j’ai eu la surprise de ne voir quasiment que des nouvelles têtes. A Angoulême ! Franchement je ne m’attendais pas à ça. Que des gens qui ne m’avaient jamais vu. Ça ne veut pas dire que je n’aime pas les anciennes têtes. J’aime les deux !
Merci beaucoup d’avoir répondu à mes questions.
Propos recueillis par Laëtitia Lassalle.
Interview réalisée le 30 janvier 2020
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