Alors que le deuxième tome de la série sort aujourd’hui en librairie, nous vous proposons de retrouver un entretien réalisée avec Mayalen Goust au cours du festival Quai des Bulles. La dessinatrice est revenue avec nous sur son premier projet de bande dessinée adulte avec beaucoup de modestie et une envie de se tester sur différents projets.
Bonjour Mayalen. Kamarades est votre première BD adulte, après beaucoup d’illustration et des ouvrages jeunesse. Est-ce une nouvelle étape ?
C’est une envie, une opportunité surtout. Je ne m’imaginais pas faire de la BD adulte un jour, mais je travaillais déjà en jeunesse avec la personne qui m’a proposé ce projet. Quand elle a quitté Flammarion pour Rue de Sèvres, je lui ai dit que j’aurais aimé faire de la bande dessinée et que, si un jour elle avait quelque chose, ça m’intéressait. Je ne savais même pas si j’en était capable ! Du coup, elle a pensé à moi, j’ai fait des essais pour savoir si ça pouvait marcher, et voilà. Le sujet m’a beaucoup plu à la lecture du scénario, et j’ai foncé !
Vous débutez par un sujet fort, celui de la Révolution russe.
Oui, mais ils avaient ce désir aussi que ce soit adapté aux adolescents, en mettant une « patte féminine » sur un sujet masculin et rude. Le côté romance était important dans le scénario.
Votre trait léger donne également un ton étonnant.
Oui, c’est mon style, c’est assez aérien, assez spontané aussi. Les traits ne sont pas trop fermés, comme on peut le retrouver dans la ligne claire. J’avais envie d’essayer autre chose.
Avez-vous pu justement tester de nouvelles techniques ?
Effectivement, ce n’est pas la technique que j’avais l’habitude d’utiliser sur mes autres albums en jeunesse, mais je voulais vraiment tester autre chose.
On retrouve aussi de grandes cases très aérées qui mettent votre style en valeur. Était-ce une volonté des scénaristes ?
Pour certains passages, oui c’était une demande des scénaristes d’avoir des grandes cases. Pour le reste, c’était à moi de décider si je voulais épurer ou non. En fait, je ne me suis jamais trop posé la question pour savoir si c’est l’habitude des illustrations en pleines pages qui m’ont amenée à ça. Mais oui, peut-être… Je débute encore dans la BD, alors je le fais à l’instinct.
Comment avez-vous été amenée à rejoindre ce projet ?
Très simplement. Benoît Abtey et Jean-Baptiste Dusséaux ont proposé ce scénario à Rue de Sèvres, puis l’éditrice me l’a proposé à son tour. Sans rapport avec L’École des loisirs puisque je ne travaillais pas avec eux au niveau de la jeunesse.
Autre habitude issue de la jeunesse, vous réalisez la couleur vous-même.
Oui, et j’adore faire ça. Ça fait partie intégrante de mon travail, mais je serais bien curieuse de voir ce que ça pourrait donner si je confiais cette tâche à un autre. Évidemment ça demande plus de travail de tout faire soi-même mais on ne me l’a même pas proposé. Et je suis assez contente du résultat.
Justement, que pensez-vous de ce premier album avec un peu de recul ?
Ça correspond à ce que j’attendais, l’impression est très bien. J’avais vraiment envie de travailler sur la couleur rouge, aussi sur le blanc et le bleu, des couleurs assez fortes et qui sont symboliques de la Russie aussi. Et je trouve le rendu très bon.
Est-ce que vous avez découvert de nouvelles contraintes, au niveau du rythme, du format ?
Oui, j’ai travaillé sur un plus grand format. Lorsque j’avais fait une BD pour les plus jeunes, Les Colombes du Roi-Soleil, Roger Seiter, avec qui je travaillais, avait fait tout le découpage du scénario. C’était donc quelque chose que je n’avais pas eu à faire mais que j’ai du faire cette fois sur Kamarades. Un travail en plus pour moi, mais c’est très intéressant d’imaginer soi-même comment la lecture allait se faire page par page, choisir ses plans, etc. C’est un peu plus de liberté finalement.
Allez-vous revenir vers de la jeunesse ensuite ?
J’aimerais bien concilier les deux. J’ai d’abord deux tomes de Kamarades à finir, le tome 2 étant quasiment terminé à l’heure actuelle. J’enchaîne les trois directement, je ne fais donc rien d’autre à côté. Ensuite on verra, pour l’instant je ne sais pas.
Découvrez-vous un nouveau lectorat ?
Oui, je suis plutôt habituée à un public d’enfants ! Et là je me retrouve à faire des dédicaces pour une population très… masculine. (rires) C’est rigolo car je ne pensais pas que ce serait à ce point-là, qu’autant d’hommes apprécieraient cette BD. Alors oui, je découvre un univers très masculin et ça me change beaucoup.
Aimeriez-vous rester dans ce style léger ou souhaiteriez-vous ensuite partir vers quelque chose de plus mature ?
Alors je suis complètement ouverte à toutes les propositions, j’aime bien me renouveler aussi. Donc j’ai bien l’intention, quand Kamarades sera terminé, de reprendre les recherches pour essayer des choses nouvelles et pour m’essayer à autre chose, pour voir si je suis capable de creuser ailleurs.
Pour cette série, vous aviez quelques contraintes, notamment avec quelques personnages connus…
Oui, et le contexte historique à respecter. Il ne faut pas faire n’importe quoi, éviter les anachronismes, ça demande de la vigilance et beaucoup de documentation aussi. Staline doit ressembler à Staline, mais sans tomber dans la caricature non plus. C’est un exercice difficile.
Merci beaucoup et bonne continuation !
Propos recueillis par Arnaud Gueury.
Interview réalisée le 23 octobre 2015.
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