Lucio Perinotto était présent sur le stand des éditions Paquet lors du dernier meeting aérien de la Ferté Alais. Auteur de trois artbooks chez cet éditeur, il a répondu à nos questions et nous a même offert une information jusque-là inconnue du grand public. Rencontre.
Bonjour Lucio, tout d’abord comment devient-on peintre de l’air ?
Un des fondateurs du groupe des Peintres de l’air, Edmond Petit, personnage fort sympathique, m’a un jour contacté : il avait remarqué mon travail et m’avait demandé si je souhaitais faire partie du groupe. Il y a eu une sorte de concours à passer que j’ai réussi. Cela date d’il y a 25 ans !
Être peintre de l’air, est-ce plutôt un titre honorifique ou est-ce que cela implique un certain nombre d’engagements ?
En effet, c’est un titre honorifique. Il permet malgré tout d’ouvrir certaines portes, par exemple, d’aller sur une base aérienne et observer de près les appareils et les hommes qui les servent. Il y a un engagement moral et qualitatif au service de l’aviation et de l’armée de l’air en particulier.
Tu as signé trois artbooks aux éditions Paquet ?
Chez Paquet, tout a commencé par un artbook qui avait été fait avec Christophe Gibelin et un autre par Laurent Negroni. J’en avais parlé avec Romain Hugault, directeur de la collection Cockpit, et Pierre Paquet a rapidement donné son accord pour un premier tome : j’avais déjà les images couleur, des couvertures du Fana de l’aviation, et il ne me restait plus qu’à y ajouter textes et dessins. J’avais une idée assez précise de ce que je voulais faire, je m’étais un peu inspiré de la structure du artbook de Christophe Gibelin qui me plaisait. L’éditeur avait également décidé de proposer un peu moins de pages que pour celui de Christophe afin que le prix soit un peu plus abordable.
Ce que j’écris est avant tout du ressenti et non de l’histoire. Aujourd’hui, il est facile d’aller sur internet pour consulter l’historique de tel ou tel avion ou d’une époque et, à mes yeux, il n’était pas nécessaire de développer cette partie. Je désirais surtout parler de la manière dont je « voyais » l’aviation et aussi ma manière de travailler. J’avais lu quelques monographies d’artistes et c’est leur vision personnelle, la façon dont ils parlaient de leur travail avec des mots simples, que j’avais trouvé intéressants.
Un quatrième tome est-il d’ailleurs prévu et, si oui, que nous réserves-tu dedans ?
Effectivement j’ai un quatrième tome en préparation mais dont l’édition est repoussée : il me manque encore un certain nombre d’images couleur. Ce quatrième tome sera la suite du tome 3, principalement consacré à la seconde guerre mondiale car c’est le thème favori des fans d’aviation.
Quelle est ta vision de l’aviation ?
J’ai une vision assez large de l’aviation. J’aime l’avion en tant que machine, souvent esthétique, mais aussi le pourquoi du comment. Quelque fois je suis un peu frustré car j’aimerais exprimer une opinion un peu plus tranchée sur certaines choses ou événements, ce que peuvent faire les auteurs de BD qui racontent avant tout une histoire et à leur manière !
Une des particularités de tes représentations aéronautiques est que le pilote est la plupart du temps visible dans le cockpit.
En effet, je fais en sorte que dans mes peintures on voit le pilote même si ce n’est parfois suggéré qu’avec trois traits de couleur, car la machine sans l’homme n’est rien. J’enlève aussi parfois le masque du pilote pour montrer l’expression de son visage dans une action. C’est probablement une des raisons pour laquelle je représente rarement un avion de dos.
Tu illustres des scènes d’aviation entre autres pour le Fana de l’aviation. Tout comme Romain Hugault, n’as-tu jamais été tenté pour sauter le pas et te lancer en bande dessinée ?
J’ai fait un essai de trois pages mais c’était trop difficile : je me suis lancé trop tardivement dans ce métier. Première difficulté : j’avais l’habitude de travailler mes huiles en grand format et la BD est plutôt faite avec des dessins de petite taille. La deuxième difficulté était que l’élaboration d’une BD demandait environ un an de travail continu ! Je savais mettre en scène, j’avais fait du « rough » lorsque que je bossais pour la pub, mais au bout de trois planches j’ai dit stop : ce n’est pas pour moi.
Tu as débuté en réalisant tes illustrations à la gouache puis à la peinture à l’huile mais depuis quelques années tu as aussi adopté le numérique. Peux-tu nous parler de ces techniques ?
Aujourd’hui j’utilise essentiellement la peinture à l’huile sur toile pour mes tableaux, et j’ai abandonné la gouache pour les couvertures du Fana de l’aviation que je réalise maintenant avec l’outil numérique, du moins pour la couleur. Le gros avantage du numérique étant de pouvoir bouger les éléments dans l’espace ; c’est important pour une couverture de revue car il y a les multiples titres à placer.
Dédicacer tes ouvrages lors d’un meeting aérien tel que celui de la Ferté Alais, ça a forcément un côté fun vis-à-vis des festivals classiques ?
Effectivement sur les meetings je rencontre mon public, qui est un lectorat de fans d’aviation mais aussi fans de BD.
Y a-t-il un appareil en particulier que tu apprécies d’illustrer ?
C’est une question piège (rires). Néanmoins je préfère les avions métalliques et les avions aux formes rondes, tel le P-47. Je suis moins attiré par les avions trop lisses, le Spitfire étant l’exception à la règle. Cela est également vrai avec les avions civils, je pense par exemple au Bréguet Deux-Ponts qui n’est pas spécialement esthétique : de profil on dirait une valise et de face également ! Pourtant j’aime beaucoup cet aéronef : il a une forte personnalité, une « gueule » qui se remarque ! Récemment j’ai représenté un Mosquito, qui pour certains est un des avions les plus réussis, mais qui est trop lisse à mon goût. Pour conclure, je dirais qu’en fait, tous les avions sont intéressants… pour peu qu’on se penche dessus !
Merci à toi d’avoir répondu à nos questions.
Propos recueillis par Nicolas Vadeau.
Interview réalisée le 3 juin 2017.
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