
Alors que la série Neige s’offre un second spin-off, nous avons profité de la présence du dessinateur Fred Vignaux au festival Quai des Bulles de Saint-Malo pour en savoir un peu plus sur cette nouvelle série intitulée Neige Origines. Rencontre.
Bonjour Fred, tout d’abord nous aimerions savoir ce que cela représente pour toi d’être chargé du spin-off d’une série qui a marqué le 9ème art ?
Cela fait un peu caricatural mais c’est un immense honneur. C’est une série que j’avais lu dans le Journal de Tintin mais je l’avais un peu oublié, quand Glénat m’a envoyé l’ensemble des albums composant la série je me suis souvenu qu’effectivement ça ne m’était pas inconnu. Il y a donc eu une petite tension pour essayer de faire perdurer la série et c’était surtout un petit challenge pour moi. Je ne me suis pas rendu compte tout de suite de l’attente des fans de la série mais c’est chose faite depuis que j’ai commencé les séances de dédicaces, les fans me posent d’ailleurs des questions sur le 14ème tome de la série mère.
Que pensent les fans de la série de ton album ?
J’ai l’impression qu’ils retrouvent leurs billes, j’ai à peu près réussi à rester dans les clous de ce que faisait Christian Gine. Ce qui était intéressant avec ce spin-off c’est que l’on retrouve les personnages ayant évolué dans la série mère.
Le fait d’avoir déjà travaillé avec Didier Convard et Eric Adam par le passé a-t-il facilité ton intégration au projet ?
Effectivement j’ai déjà travaillé avec ce tandem de scénaristes. Dans Le Pendule de Foucault, il y avait énormément de paysages post-apocalyptiques et je pense qu’ils se sont dit que je me débrouillais pas mal sur ce genre de dessins et que ça serait bien de me confier Neige Origines. J’ai également collaboré avec Didier Convard et Eric Adam sur l’album Vercingétorix et, vu que tout s’est très bien passé entre nous, cela a été tout naturel de partir sur un autre projet en commun même si cela a été une énorme surprise pour moi que l’on me propose ce projet bien précis. Quand j’ai appris la nouvelle, j’étais en train de boucler Vercingétorix, j’ai demandé un temps de réflexion même si en mon for intérieur j’avais déjà pris ma décision.
Contrairement aux autres titres précédemment cités il s’agissait cette fois d’une série complète et non de one-shot. Cela a pesé dans ta décision ?
Cela faisait un moment que je faisais des one-shot même si j’avais réalisé une trilogie avec Time Twins et un diptyque avec L’Appel des légendes mais il est vrai que pouvoir partir sur une série représente un véritable confort. Si l’histoire du premier tome de Neige Origines est un one-shot, la prochaine histoire que nous allons réaliser sera un diptyque car, contrairement au tome 1 qui comptait 52 planches (sans compter le préambule), nous allons composer avec un format plus classique de 46 planches. On a estimé que nous ne pouvions pas raconter quelque chose de suffisamment intéressant en 46 planches, c’est pourquoi nous partons sur un diptyque en mettant à l’honneur tout ce qui a été fait dans Neige par le passé, ce sont des thèmes assez complexes qui sont abordés. Ce que j’aimais tout particulièrement dans la série mère, c’était justement les aventures qui se déroulaient en deux tomes, je pense par exemple à l’épisode se déroulant à Venise.
Le fait qu’il y ait eu une autre série dérivée de Neige avant vous, vous ne vous êtes pas demandés si ça serait une série en trop dans l’univers ?
On s’est surtout posé la question sur la confusion pour les lecteurs. Après personnellement je pense que c’est uniquement une question de cycles, je vis ça de l’intérieur mais je rencontre des lecteurs qui lisent Neige Origines sans connaître la série mère. Petit à petit les choses vont être claires pour les lecteurs, Neige Fondation étant terminée, Origines comptera au minimum trois albums, sans compter le 14ème tome de Neige qui sortira certainement un jour.
Y a-t-il un cahier des charges précis quand on est choisi par Glénat pour dessiner ce spin-off ?
Il n’a pas été décrit comme un cahier des charges, c’est moi qui me suis fixé des limites. Il fallait respecter l’ensemble de l’œuvre graphique qui avait été créé par Christian Gine et Didier Poli par la suite. Pour moi c’était facile car d’habitude sur mes projets j’inventais des Mondes, là tout était déjà créé avec une documentation à foison. La contrainte était plutôt une liberté pour ma part grâce à cette documentation conséquente. J’ai aussi puisé dans mon expérience sur Vercingétorix puisque les personnages évoluent à Rome et le costume de l’un des protagonistes principaux est fortement influencé par les armures romaines d’une certaine époque.
Il y a toujours dans la série de nombreuses planches mettant en avant des monuments d’Europe, c’est un aspect du travail de dessinateur qui te passionne ou au contraire redoutes-tu ce type de scènes ?
Ce n’est pas du tout une corvée pour moi parce qu’en fait dans le style post-apocalyptique le décor est un personnage à part entière. Si on ne s’astreint pas à bien décrire les décors ou faire des choses délabrées, en décomposition tout en offrant une vision qui permette de reconnaître le lieu cela ne fonctionne pas. Le post-apocalyptique part de ce postulat, c’est l’univers qui a pris un chemin différent voire qui a été détruit donc il faut vraiment le dessiner pour donner cette impression là. En même temps, Rome est un véritable personnage, on a vu tellement de films dans cette cité, ce beau pays qu’est l’Italie. Quand on est à Rome on est obligé de dessiner les monuments les plus emblématiques tels que le Colisée et le château St Ange qui ont une architecture singulière.
Christian Gine a-t-il un regard sur tes planches et te donne-t-il des conseils ?
J’ai présenté mes travaux de recherches à Christian au début, à mon grand regret je ne lui en ai pas présenté assez souvent et puis vers la fin je lui ai montré mes planches avant de les livrer à l’éditeur. Il a bien aimé mon travail sur cet album, j’ai en quelque sorte été adoubé. C’était le risque en dessinant cette série que ça ne plaise pas à Christian mais c’est une personne qui dit vraiment les choses et je suis plutôt heureux que finalement il soit satisfait de moi. Si jamais ça ne lui avait pas plu, cela m’aurait bien évidemment brisé le cœur parce que donner autant d’énergie sur un tome et qu’après le géniteur de l’œuvre n’aime pas c’est dur mais pour le coup c’est bon.
Et maintenant que tu es adoubé par Christian Gine, vas-tu continuer à lui envoyer tes travaux en cours de réalisation ?
J’imagine que oui, même si pour l’instant je ne lui ai rien envoyé encore du tome 2. Cette interview tombe plutôt bien, c’est un rappel pour que j’envoie quelque chose rapidement.
Ton actualité va se concentrer exclusivement sur Neige Origines désormais ?
Je réalise des travaux ponctuels d’illustrations, comm’, mais je me concentre vraiment sur cette série car Glénat mise dessus aussi, il y a une bonne accroche sur le tome 1 et cela me motive pour la suite. L’objectif est de sortir un album par an tout en sachant que je réalise moi-même mes couleurs, elles sont assez longues à faire car elles sont assez travaillées, j’essaye de développer des ambiances qui fassent naturelles. Je mets à peu près dix mois pour réaliser les planches en noir et blanc et deux à trois mois pour la mise en couleurs.
Merci à toi d’avoir répondu à nos questions.
Propos recueillis par Arnaud Gueury et Nicolas Vadeau
Interview réalisée le 24 octobre 2015.
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