Titre : Trois Jokers
Scénariste : Geoff Johns
Dessinateur : Jason Fabok
Coloriste : Brad Anderson
Éditeur : Urban Comics
Collection : DC Black Label
Parution : Octobre 2021
Prix : 18€
Trois assassinats simultanés sont perpétrés exactement au même moment dans Gotham City, les trois en lien avec l’identité ou le passé du Joker. Pour la police, il s’agit encore d’un numéro du Prince Clown du crime destiné à moquer leur incapacité à le capturer. Pour Batman, il s’agit d’un message plus subtil, lié à la stupéfiante révélation assénée quelques années plus tôt : il n’y a pas un Joker, mais trois ! Le criminel. Le clown. Le comique. Chacun a accompli sa part de méfaits et laissé une trace indélébile dans les corps et les esprits de la Bat-Famille, laissant Jason Todd mort ou blessant grièvement Barbara Gordon. Le Chevalier Noir doit-il forcément y croire ou l’un d’eux est l’original ? Et comment maintenir l’adhésion dans son camp quand le passé revient de manière aussi violente, accompagné de non-dits et de mensonges ?
« Je suis le grand looping, la terrible roue du hamster. Le cycle de souffrance qui emprisonne chacun de vous. Red Hood, par exemple. T’es-tu jamais demandé pourquoi il se sert de mon ancien alias? Quelle personne sensée endosserait l’identité de son assassin? »
En balançant une information aussi surprenante que déroutante pour les lecteurs au cours de son passage sur Justice League, Geoff Johns s’est encombré d’un élément qu’il devait fatalement finir par réutiliser. Accaparé par son travail de producteur sur l’univers cinématographique de DC, il aura fallu du temps pour avoir les réponses à ce mystère. Plutôt décrié ces derniers temps, le scénariste va sans doute voir de nombreuses critiques sur cet exercice qui, sans être flamboyant ou bouleversant, n’est pas si inintéressant. Urban Comics a d’ailleurs soigné la sortie de cet album, avec trois couvertures variantes représentant les trois membres de la Bat-Famille et comprenant chacun une carte à jouer. Les plus exigeants pourront logiquement pinailler sur certains détails de l’intrigue ou sur des héros monolithiques dont le comportement ne change pas au fil de l’intrigue – Batman froid et secret, Batgirl revancharde et optimiste, Red Hood violent et solitaire – mais, outre une idée de base un peu étrange et contestable, le récit se tient. Les multiples références à la toute première apparition du Joker, à Un deuil dans la famille et The Killing Joke, constituent le fond de l’histoire et des rebondissements, alors que la représentation du super-criminel sous trois identités est une démarche audacieuse qui fonctionne assez bien, les auteurs retombant sur leurs pattes lors du chapitre final. Si le scénario sera le point de friction de ce one shot, il sera sans doute plus facile de s’accorder sur le graphisme de Jason Fabok, impeccable tout au long des trois chapitres. Son trait énergique, ses hommages à Brian Bolland et sa gestion du rythme font pencher la balance du bon côté, avec plusieurs scènes particulièrement réussies dans leur intensité et leur tension dramatique.
Un numéro d’équilibriste autour du super-vilain le plus charismatique et insondable de la BD américaine.
Arnaud Gueury
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