Titre : Le Tambour de la Moskova
Scénariste – Dessinateur – Coloriste : Simon Spruyt
Éditeur : Le Lombard
Parution : Mars 2021
Prix : 19,99€
Malgré la protection du curé qui lui avait suggéré de rentrer au séminaire pour éviter la conscription, Vincent Bosse se retrouve durant l’été 1812 sur le champ de bataille au sein de la Grande Armée. Grâce à sa figure d’ange, on lui donne la fonction de tambour, un loin-des-balles, afin de l’exposer le moins possible aux tirs ennemis. Son beau minois fait qu’il est sans cesse protégé par ses pairs. Certainement que tous voyaient en lui la seule lueur d’espoir et le seul reste d’innocence subsistants dans l’absurdité de la désastreuse campagne de Russie menée par Napoléon. Même lors de sa captivité, le colonel Davidov et Pétia Rostov prennent soin de lui. Tout le monde lui sourit, y compris l’Empereur les rares fois où il l’a croisé. De cela, Vincent en est convaincu. Il a vécu la victoire tactique près du village de Borodino, connu Moscou à l’état de ville ouverte, la débâcle mais il s’en est sorti indemne. Cependant, il n’a jamais quitté la Russie et s’est installé non loin de la redoute Raïevski. C’est son histoire qu’il raconte à un grand écrivain qui ne sait pas encore s’il appellera son œuvre, qu’il projette d’écrire sur la base des témoignages dont celui du tambour Bosse fait partie, Tout est bien qui finit bien ou Guerre et Paix.
Pour son premier album chez Le Lombard, Simon Spruyt fait fort en revisitant un épisode d’un des monuments de la littérature russe, Guerre et Paix de Léon Tolstoï. Pour ce faire, l’auteur met en scène dans son roman graphique une rencontre imaginaire entre le célèbre écrivain (ce qui n’est dévoilé qu’en fin d’album) et Vincent Bosse, le tambour au visage d’ange, un personnage secondaire du chef d’œuvre de l’écrivain. Une mise en abyme où Léon Tolstoï et son personnage essayent d’apprécier si l’innocence a une place durant la guerre et un véritable cauchemar pour Vincent Bosse qui tente – en vain – de donner un sens à ce qu’il vit et de comprendre son rôle dans tout cela. Le Tambour de la Moskova s’inscrit ainsi de manière originale parmi les nombreux événements visant à commémorer le bicentenaire de la mort de Napoléon 1er, le 5 mai 1821 sur l’île Sainte-Hélène. Le récit est prenant et nous entraîne sans mal sur les champs de bataille aux côtés de Vincent grâce à la retranscription graphique remarquable qui en est faite. Le contraste entre l’apparence blanchâtre du tambour et l’ensemble de la palette chromatique, parfaitement en phase avec les lieux, est saisissant et des plus évocateurs. Un travail de mise en couleurs directe remarquable où certains personnages ne sont qu’esquissés et quelques visages réduits à une simple forme ronde au style enfantin faisant penser aux figurines en bois de Casse-Noisette (ce qui est drôle et surprenant !).
Une œuvre singulière et réussie qui ne manquera pas de marquer les esprits.
Stéphane Girardot
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2 Responses à “Tambour de la Moskova (Le)”