Titre : Haïkus de Sibérie
Auteur : Jurga Vilé
Illustratrice : Lina Itagaki
Éditeur : Sarbacane
Parution : Mars 2019
Prix : 22€
Juin 1941. La famille Miélis est tirée du lit par des soldats russes chargés de les emmener dans un camp de travail. Qu’emporter ? Le père prend des pommes, Algis, lui, ne pense qu’à emporter Martynas, son jars. Ce dernier dissimule sous son aile l’album-photo familial. Et voilà la petite famille qui se met sur son 31 et grimpe dans la charrette qui la déposera à la gare – non sans faire plusieurs arrêts afin de faire s’y entasser d’autres futurs exilés de force. À la gare, les hommes sont séparés des femmes et des enfants. Grâce à la postière, ces derniers arrivent au village avec le nécessaire pour écrire des lettres qui seront leur lien avec la Lituanie. Inspirés par les haïkus de Pétronelle ou la chorale de Mlle Violeta, nos héros traversent cette épreuve.
Évidemment, quand on pense au thème douloureux de la déportation pendant la Seconde Guerre Mondiale, c’est le magistral roman graphique Maus qui vient à l’esprit mais voilà une nouvelle œuvre qui pourrait bien devenir un classique, pour un public plus jeune. Si la maison d’édition lituanienne Aukso Žuvys a pour fierté d’accorder autant de place à l’histoire nationale si affectée par l’exil et la déportation, on ne peut que se réjouir que les multiples récompenses obtenues par Sibiro haiku en 2017 aient encouragé d’aussi nombreuses traductions, chez Sarbacane en France – avec un travail de Marielle Vitureau à souligner tant la poésie de l’ensemble est remarquable. Rien ne détonne dans ce roman graphique où se mêlent planches traditionnelles découpées en cases et utilisation libre de la page : récit du jeune Algis, lettres mais aussi collages ou, bien sûr, haïkus – le tout rédigé à la main par la dessinatrice, faute de police informatique adaptée. Suivant le principe du haïku, ce sont les détails qui font la puissance de ce récit naïf, entre focalisation sur les poux ou les punaises, bagarre avec d’autres enfants – qui se trouvent être russes, eux – et émerveillement devant la nature.
Derrière cette sublime couverture, un regard enfantin profondément touchant sur la déportation.
Chloé Lucidarme
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