Sylvain Ferret était présent au Festival International de la Bande Dessinée d’Angoulême à l’occasion de la sortie du troisième et dernier tome des Métamorphoses 1858. Nous avons profité de son passage dans la cité charentaise pour lui poser quelques questions.
Il s’agit de votre première bande dessinée, pourriez-vous nous parler de votre parcours ? Qu’est-ce qui vous a amené à réaliser cette trilogie ?
J’ai toujours voulu faire de la BD. Je me suis d’abord orienté vers le graphisme. J’ai bossé dans ce domaine, graphisme, maquettes, design, notamment dans la publicité pendant dix ans, tout en essayant de signer des projets et d’en envoyer aux éditeurs. Puis j’ai rencontré, par le biais de ma femme, Alexie, la scénariste, qui fait partie de ma belle-famille, c’est ma tante. Un jour elle m’a dit qu’elle souhaitait écrire un scénario. Je lui ai dit de se lancer, que moi je n’y arrivais pas seul, qu’il fallait quelqu’un pour m’aider. Alexie a fait des études d’Histoire, elle avait envie d’écrire une histoire depuis longtemps. On s’est lancé comme ça. Ça nous a pris un an, on a monté notre projet et puis c’est passé.
Vous avez au départ donc essayé d’écrire vos histoires tout en les dessinant et ça n’a pas fonctionné ?
Oui, c’est ça. Autant pour le dessin je le pratiquais beaucoup, autant le scénario, j’avais des manques. Même si je pense que le dessin n’était pas forcément éditable à l’époque non plus.
C’est quand même une BD un peu particulière avec un graphisme particulier. Quelles sont vos influences ? Pourquoi ces couleurs noires, rouges, verts ? C’est l’histoire qui veut ça ?
Je n’avais pas le contrôle sur l’histoire de base. Je pense que l’histoire n’est pas vraiment joyeuse. Après je me suis adapté. Bon, je n’ai quand même pas tendance à écrire des histoires trop joyeuses ni à dessiner des trucs très joyeux. Je ne pense pas que je vais me lancer dans la comédie demain ! Mais voilà, l’histoire me plaisait. Je n’aurais pas forcément choisi le 19ème siècle, ce n’est pas forcément une imagerie qui me parlait. C’était la proposition d’Alexie, ça m’allait très bien. C’était un super support pour travailler. Pour ce qui est des couleurs, des ambiances, ça s’est fait assez naturellement. Je pense que le scénario aide beaucoup. Quand on écrit une scène d’autopsie glauque, on ne va pas faire un truc avec des rayons de soleil.
Les dessins, les décors font très cinéma. Est-ce que le cinéma est une source d’inspiration pour vous ?
Je pense que c’est ma source d’inspiration principale. Je consomme beaucoup plus de cinéma que je ne consomme de bandes dessinées par exemple. Les décors proviennent de l’histoire, du scénario, ce n’est pas vraiment réfléchi en fait, ça se fait naturellement… Quand je fais mes storyboards, que je fais ma mise en page, ma narration, mes différentes influences se mélangent en fait, c’est donc naturellement le style vers lequel je vais. Je n’ai pas lu beaucoup de bandes dessinées dans mon format en fait. Du grand format, j’en lis très très peu. Ce n’est pas que je n’aime pas ça, c’est plus une question d’occasion en fait. Je lis plus de narration qui sont avec des différences de rythme, moins classique. Du coup j’ai essayé de poser cela dans le grand format, ce qui est assez compliqué…
Et ça marche plutôt bien…
Eh bien merci !
Les trois tomes sont sortis assez rapidement. Combien de temps vous a-t-il fallu pour les dessiner ?
Entre dix mois et un an. Enfin, c’est dix mois à chaque fois. J’ai un rythme très calé donc je ne change pas cela. Quand le tome 1 est sorti, j’avais déjà commencé le tome 3.
Quand vous avez présenté votre projet, vous aviez déjà beaucoup de matière à montrer ?
Oui. Enfin, on avait toute l’histoire. Alexie avait tout écrit, elle avait trois tomes dialogués. Ça faisait je ne sais pas combien de pages mais un truc énorme ! Moi j’avais déjà fait quelques planches et pas mal de dessins à côté aussi. On n’avait pas fait l’album entier.
Le projet remonte un peu alors si vous étiez déjà au troisieme tome à la sortie du premier…
Je crois que ça remonte à 2016. On a écrit en 2016. Fin 2016 on l’a proposé et début 2017 on l’a commencé.
Vous avez trouvé un éditeur facilement une fois que vous aviez votre projet ? Il vous a fallu démarcher beaucoup de maisons d’édition ?
Oui, on en a démarché beaucoup mais on a trouvé assez facilement. En fait, on a quelqu’un – qui s’appelle Stéphane De Caneva et qui a fait la série Metropolis pour Delcourt – qui nous suivait, on ne sait pas trop comment il est tombé sur nous, ça s’est fait naturellement… Et quand on a fini le projet, j’ai commencé à démarcher des auteurs pour avoir des adresses d’éditeurs, dont Stéphane. Il nous a filé des adresses et on a réussi à envoyer le projet au directeur de collection, David Chauvel. Il a lu le truc en cinq jours. Et il nous a fait son retour tout de suite. Mais oui, on avait envoyé à beaucoup d’éditeurs. On a eu pas mal de retours, négatifs. Et on a eu deux, trois touches après mais trop tard.
Les trois tomes des Métamorphoses 1858 sont terminés. Quels sont vos projets pour la suite ?
Il y a plein de projets. J’en parlerai un peu plus lorsque ce sera vraiment officiel, mais oui, il y a le projet d’une nouvelle série où je serai scénariste également.
Vous n’avez pas d’autres projets avec Alexie en revanche ?
Non. Je ne sais pas si Alexie va se lancer dans un autre scénario. Nous l’avions évoqué mais ça ne s’est pas fait. Du coup, moi j’ai continué mon chemin en solo. Comme Alexie avait écrit son scénario comme celui d’une nouvelle, comme un scénario de cinéma, j’ai eu très envie d’écrire. De voir que je pouvais adapter une histoire qui n’était pas forcément un scénario de BD classique, ça m’a donné encore plus envie d’écrire. J’ai bossé ça pendant longtemps. Beaucoup pendant l’année dernière. Et puis il semble que ça va porter ses fruits. Ce n’est pas encore signé, donc je ne m’avance pas trop, je ne dis pas de quoi ça parle ni rien…
Merci beaucoup Sylvain pour toutes ces réponses !
Propos recueillis par Laëtitia Lassalle
Interview réalisée le 31 janvier 2020.
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