Titre : Salto – L’Histoire du marchand de bonbons qui disparut sous la pluie
Scénariste : Mark Bellido
Dessinatrice – Coloriste : Judith Vanistendael
Éditeur : Le Lombard
Parution : Juin 2016
Prix : 22,50€
8 décembre 2010, Pampelune en Navarre. Il est six heures du mat’ et Mikel se lève comme tous les matins depuis plus de trois ans pour aller au boulot. Avant de démarrer sa voiture, il en fait le tour pour vérifier qu’elle n’est pas piégée. Car Mikel est un « txakurra », un garde du corps privé employé par l’État pour protéger des personnalités basques de menaces terroristes perpétrées par l’ETA. Mais avant cette vie qui lui a fait perdre beaucoup de choses, il était quelqu’un d’autre. Il s’appelait Miquel, vivait dans un petit village du nom de Costur dans la province de Castellón avec sa femme et ses deux enfants et vendait des bonbons. Surtout, il rêvait d’être écrivain. Il pensait que le lieu où il résidait n’était pas propice à l’inspiration. Et c’est lors du jour de l’an 2007 que lui vint l’idée de faire de la protection rapprochée pour avoir une histoire à raconter et résoudre ses problèmes financiers par la même occasion. Ainsi, un jour d’automne de la même année, il décide de s’installer dans le Nord avec sa famille pour faire le grand saut dans ce monde qui lui est totalement inconnu.
Salto est le genre de bande dessinée que l’on n’attend pas et qui vous cueille simplement par son originalité scénaristique et son dessin. Dans ce roman graphique de plus de 300 pages, Mark Bellido (El Mesías) aborde la question de l’indépendantisme basque à travers le vécu d’un garde du corps privé (un « txakurra », chien en basque) employé, comme un grand nombre le furent, pour protéger des personnalités menacées de mort par l’ETA. Une fiction autobiographique que l’auteur traite avec un ton léger et beaucoup d’humour pour contrebalancer avec la tension de la situation générale. Les attentats du mouvement séparatiste ne sont pas abordés directement. L’auteur concentre plutôt son récit sur la manière dont le danger est vécu par les uns – les politiciens protégés comme Javier – et les autres – les gardes du corps n’ayant plus de vie – ainsi que sur le changement psychologique du héros. En effet, Miquel/Mikel, qui au départ est une personne naïve, rêveuse et très famille, devient peu à peu un être égoïste qui perd toutes ses illusions, sa femme et ses enfants avec une résignation déconcertante. Un projet qui a été un réel défi pour Judith Vanistendael (David, les femmes et la mort) car dessiner des voitures, des lunettes de soleil et des flingues n’est pas son truc. L’auteure a osé se mettre en danger en travaillant sur cet univers mais également en utilisant de nouvelles techniques : dessins à base de masses et de tâches, colorisation aux crayons de couleur. Le résultat est saisissant et bluffant. Le contraste entre les différentes ambiances espagnoles est superbement rendu.
Une lecture qui est à la fois touchante, intéressante, divertissante et mise en valeur par de belles originalités graphiques.
Stéphane Girardot
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Une réponse to “Salto”
6 septembre 2019
Deux vies de Pénélope (Les) - La Ribambulle[…] empreints d’émotions et plein de vérité. L’auteure a réalisé le présent album après Salto alors que l’idée était déjà présente dès la fin de David, les femmes et la mort. Un […]