Titre : La Farce des Hommes-Foudre
Scénariste : Matthieu Alexandre
Scénariste – Dessinateur : Loïc Verdier
Coloriste : Nicolas Vilet
Éditeur : Casterman
Parution : Août 2018
Prix : 22€
Printemps 1959. Albertus est en plein rêve suite à une prise de stupéfiants lors de son trip à Katmandou. Avec un groupe d’amis, il teste tout ce qu’il y a à goûter dans le domaine. Au moment où il se réveille en sursaut, Kenny a préparé un « cosmic chutney ». À peine debout, Albertus tire dessus mais manque de s’étouffer. Et lorsque Kenny parle de mescaline, il est encore prêt à consommer mais son ami refuse et ils se chamaillent. Albertus, un peu énervé, sort et fait un tour dans les rues de la ville. Il dessine aussi. Sa balade le mène dans un bar où il voit une femme qui ressemble comme deux gouttes d’eau à celle de son rêve/cauchemar. Il décide de la suivre pour savoir qui elle est. Mais quelle erreur ! Le jeune beatnik se retrouve malgré lui enrôlé dans un groupe de cavaliers nomades, des guerriers Khampas surnommés les Hommes-Foudre, dont fait partie Dolma, qui mènent une guérilla contre l’armée chinoise et le régime de Lhassa. Leur but : reprendre le Tibet.
Voilà un sujet somme toute très sérieux traité de manière légère, c’est à dire avec beaucoup d’humour mais pas par-dessus la jambe. C’est très efficace et de surcroît très intéressant. Si Matthieu Alexandre et Loïc Verdier prennent la liberté de faire intervenir un jeune Européen, Albertus, et la C.I.A. en la personne de Poe dans cette guérilla – leur présence n’est que pure fiction pour l’un et supposition pour l’autre – les auteurs se basent sur un fait réel et certain pour l’intrigue centrale de leur récit : la libération du Dalaï-Lama par des cavaliers nomades Khampas en mars 1959. Et c’est plutôt bien ficelé ! 150 pages d’aventure où l’on apprend beaucoup de choses sur la culture et la société tibétaines, la géopolitique par le biais d’un anti-héros qui n’est pas du tout en accord avec sa propre société et sa propre culture mais qui, peu à peu, se sent à l’aise dans la situation incongrue dans laquelle il se retrouve. Les personnages ont des gueules et sont attachants, en particulier la guerrière et très féministe Dolma. Le travail précis de documentation réalisé en amont donne énormément de crédit à cet album qui se lit avec beaucoup de plaisir et constitue une belle surprise en même temps qu’un bel hommage à ceux qui se battent pour le Tibet. La prestation graphique de Loïc Verdier est dans le ton et fait penser par moment aux Innommables de Didier Conrad, un ressenti accentué par la mise en couleurs réussie de Nicolas Vilet.
Ce premier long récit de Loïc Verdier, à la fois drôle et sérieux, est très réussi. Et ça, c’est loin d’être une farce !
Stéphane Girardot
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