C’était l’un des derniers jours d’été. Le ciel était dégagé et le soleil brillait. Les éditions Dargaud proposaient à la presse un petit-déjeuner en compagnie de Marc Cuadrado et Frank Margerin pour le lancement du tome 3 de la série Je veux une Harley. Marc Cuadrado fut le premier arrivé mais pas de Frank Margerin à l’horizon. On nous expliquera après quelques temps qu’il nous rejoindrait plus tard. Place à la rencontre.
La Route 66 est le graal des Harley, pourquoi avoir attendu le tome 3 pour en parler ?
Marc Cuadrado : En fait, au départ, le premier album devait être un one shot. Je voulais raconter les aventures d’un couple de quinquagénaires avec comme fil conducteur la Harley et son milieu. C’était quelque chose qui n’avait jamais été fait en BD. On voyait des Harley dans des bandes dessinées mais jamais l’approche de ce monde, que je trouve intéressant et assez riche. Et donc, j’ai raconté mon histoire car c’est assez autobiographique quand même, surtout avec cette série. Le premier est sorti, a eu un beau succès, et on nous en a tout de suite réclamé un second. Après l’acquisition d’une Harley, venait ensuite, logique, les clubs, car quand tu acquières une Harley tu es inscrit d’office au club Harley pendant un an gratuitement. De plus j’avais envie d’en parler. Parce que lorsque l’on est motard et particulièrement en Harley, il y a toute une panoplie qui va avec. On aime bien se mettre des patches dans le dos, que l’on appelle des bananes où le nom des clubs est écrit. Car cela nous permet de rouler en groupe pour être plus impressionnants et jouer un peu les durs. Bien sûr, il existe des vrais purs et durs dans ce milieu. Il y a beaucoup d’autodérision dans ces bandes dessinées parce que j’ai le recul de par mon métier de voir le côté un peu risible des choses. Ce sont des motos fantastiques, un milieu génial mais il y a beaucoup de gens qui achètent ça pour se donner une posture et je me moque un peu de ça. Un autre cliché de la Harley, c’est de rouler sur les routes de l’ouest américain. D’où mon troisième tome, car c’est le rêve de beaucoup de personnes qui roulent en Harley de réaliser ce road trip. Donc Frank et moi sommes partis et on en est revenu il y a tout juste un an. Je l’avais déjà fait en voiture mais à moto ce n’est pas pareil, on a d’autres sensations, une autre vision et on fait carrément partie du décor qui est magnifique. Donc je suis parti pour écrire et Frank pour prendre des photos. Bien sûr, il y a des anecdotes qui sont vraiment arrivées et que j’ai transposées dans l’album. Comme celle-ci, où un jour, on s’était perdu et où on a pris une pluie de grêle. On s’était dit : « Génial, on va pouvoir le raconter dans l’album !». Comme quoi, quand on vit les choses, on le raconte différemment que si on l’avait inventé. Le vivre, c’est une chance quelque part.
Pour Las Vegas, c’est vraiment ce qui s’est passé ?
MC : Non non ! Frank et moi sommes assez sages. En fait, ce n’était pas à Las Vegas, mais dans une ville qui s’appelle Laughin, Nevada, que l’on surnomme le petit Las Vegas, où il y a beaucoup de clubs comme ça, avec des filles. Nous avions rendez-vous avec d’autres personnes de notre groupe de motards, car nous sommes partis avec un tour-opérateur. On ne trouvait pas de bar et, à un moment donné, Frank et moi sommes tombés dans un endroit où il y avait des filles en petites tenues qui ont voulu nous accueillir, mais on s’est vite tiré ! Cette partie-là de l’histoire est complètement inventée. C’est pour le personnage de Calzone, qui est assez coloré dans l’histoire, que cette aventure a été créée, car c’est lui qui avait envie de profiter un peu de Las Vegas. Car c’est la ville du jeu, du sexe, etc. D’ailleurs c’est une ville que j’ai visité au moins quatre fois. Elle est impressionnante, c’est comme un Disneyland pour adultes. Ce genre de voyage, c’est vraiment pour les touristes, c’est ce qui est intéressant pour la bande dessinée. C’est comme pour les territoires indiens, il y a beaucoup de côté commercial où les poteries sont made in china. Tu retournes un pot et tu vois la provenance.
Wendy existe-t-elle vraiment ?
MC : Euh non, Wendy n’existe pas, mais j’ai voulu ajouter un personnage féminin, qui a à peu près les mêmes proportions qu’une fille sur un des forums que je fréquente, qui est la bonne copine. D’ailleurs les autres l’appellent mon pote à nichons. Expression que j’ai replacée dans la BD car je trouvais que c’était marrant. Mais Wendy n’existe pas. Bien évidemment il y a des choses qui n’existent pas dans la BD. Même si parfois il y a quelques anecdotes qu’il faut transformer pour les rendre un peu plus drôles. C’est tout le travail du scénariste de partir d’un fait existant et de l’exagérer au maximum.
Cela faisait longtemps que vous prépariez ce voyage ?
MC : Non, en fait on ne savait pas quand on allait faire le tome 3. Frank était disponible, et m’a demandé si je voulais que l’on enchaîne, et je lui ai répondu que je souhaitais faire un road trip aux Etats-Unis, mais je voulais surtout partir avec un tour-opérateur et ça, ça se prépare à l’avance. C’est le marketing qui a proposé un partenariat, et il y en a un qui a réagi tout de suite, puis on est parti. Mais c’était juste avec les délais. Ça s’est quand même préparé deux mois avant. Ce sont des voyages qui se préparent généralement un an avant, parce qu’il n’y a pas beaucoup de place. Il y a la Route 66 qui est assez longue, que l’on n’a pas faite entièrement. Elle traverse le pays d’est en ouest, elle doit faire à peu près 4600 km. Mais on s’est plutôt concentré sur l’ouest, qui est très touristique. Avant, elle était en train de mourir. Un peu comme dans le film Cars. Heureusement, il y a eu une association créé par Angel Delgadillo qui est barbier. C’est lui qui a vraiment fait revivre la Route 66. Donc ça reste très touristique, d’ailleurs tous les bikers s’y arrêtent. Et ce personnage, Angel, est vraiment une icône de la Route 66, un vieux monsieur qui a vécu plein de chose et qui doit avoir 87- 88 ans. Il est très connu aux Etats-Unis. Une personne que l’on a rencontrée. Mais ça reste touristique avec ses produits dérivés. C’était exactement ce que je recherchais pour la BD.
Est-ce qu’en général vous féminisez un petit peu le milieu de la moto ?
MC : C’est un milieu très masculin quand même, mais il y a de plus en plus de filles qui se mettent à conduire une Harley. Justement Harley-Davidson essaye de développer sa clientèle féminine qui, je crois, est de 14%. Ça ne parait pas beaucoup mais c’est déjà deux fois plus qu’il y a quelques années. Et c’est pour ça que dans le tome deux, j’ai fait conduire une moto à la femme de Calzone, qui a passé son permis d’ailleurs. Et je compte la faire revenir.
On peut donc espérer un tome 4 ?
MC : Normalement oui, je commence déjà à réfléchir dessus, ça dépendra de l’emploi du temps de Frank mais bon, en tout cas, on y pense. D’ailleurs Harley France est partenaire de la BD, ils ont accroché tout de suite sur le projet. Ils nous soutiennent et nous mettent pas mal de choses à disposition. Pour le tome 4, je pense que l’on parlera de la femme du personnage principal, Marc Carré, qui se pose beaucoup de questions existentielles et commence à s’intéresser un peu à la religion, aux nouvelles tendances et donc j’en profiterai pour faire passer un peu de choses personnelles au travers de la Harley.
Alors à la base il était prévu de faire un one-shot et du coup on est déjà au troisième voire au quatrième et peut-être plus, pensez-vous que le public a adhéré parce que vous avez vécu les choses ou pour une autre raison ?
MC : En tout cas, plusieurs personnes qui ont une Harley se sont retrouvées dans le tome 1 et disent : « mais c’est moi, c’est mon histoire ! » Alors qu’en fait j’ai observé certaines choses, comme lorsque l’on se regarde dans les glaces des vitrines, pour voir un peu l’allure que l’on a. Tout le monde fait ça, mais personne ne le dit. Et donc, ça les fait sourire parce qu’eux le font aussi. Ce sont des petites choses comme ça que j’ai relevées et les gens disent : « c’est exactement moi, ou nous. » Donc les gens se retrouvent. Et peu importe le support, si les personnes se retrouvent, elles aiment. C’est ce qui fonctionne, à mon avis.
[Frank Margerin fait une entrée remarquée à ce moment-là. On le salue, lui propose un café et des viennoiseries et il s’assoit à coté de Marc. « Tournez à gauche », c’est son GPS qui s’est mis en route tout seul. Tout le monde se met à rire puis on reprend l’interview après que Marc lui ait fait un résumé]
Frank connaissait le milieu Harley parce qu’il est dans le milieu motard depuis très longtemps, donc forcément il les côtoie. Maintenant c’est lui qui me présente des Hells Angels (rires) !
Le personnage du patron, qui finalement a cette passion mais la cache, est inspiré d’une personne réelle ?
MC : Oui un peu, Le personnage de Calzone c’est mon beau-frère, que j’ai vraiment exagéré car, dans la réalité, il n’est pas comme ça. Mais c’est lui qui m’a inspiré ce personnage là. Il avait un patron avec qui il s’engueulait souvent et je lui ai rajouté la BMW, car il existe une opposition entre ceux qui possèdent une BMW et ceux qui ont une Harley. C’est vrai que certaines personnes critiquent les Harley mais elles finissent par en acheter une. C’est aussi ce que j’ai remarqué sur les forums d’Harley-Davidson. Des gens qui ont entre 50 et 60 ans, qui ont roulé très tôt et sont passés par toutes les motos, finissent avec la Harley. Ça correspond peut-être à l’âge, je ne sais pas. En fait, le patron tape sur les Harley mais, au fond de lui, ça le fait fantasmer. Donc c’est pour ça qu’il y va en cachette.
Pour les paysages, Marc nous a dit que vous aviez pris des photos mais avez-vous aussi fait des croquis ?
Frank Margerin : Je me suis rendu compte que non, pas tant que ça. Parce que quand on est sur place, on voit des étendues à perte de vue, avec des rochers. On en prend plein les yeux, c’est magnifique mais en BD ça rend pas terrible. Enfin, c’est difficile de rendre cette atmosphère. J’ai plutôt pris des détails que des paysages. Pour les paysages, je les dessine souvent comme une montagne au loin, et puis des étendues à perte de vue. Mais c’est surtout pour Las Vegas où il a fallu être précis, là j’ai vraiment plein de documentation. C’est vrai que, lors des dédicaces, je fais toujours un petit rocher et hop ça y est, on sait que l’on est dans l’ouest américain. J’ai fait plus de 2300 photos et je me suis rendu compte qu’il y avait tout ce que l’on veut sur internet mais au moins comme ça nous avions les nôtres. Et puis sur certains trucs, comme la voiture du guide, j’avais envie que ce soit la même.
Et justement avez-vous pris des notes tout au long de votre road trip ?
MC : Oui, moi je prenais les notes, Frank plutôt les photos.
FM : C’était drôle parce que le guide, quand il voyait Marc en train de prendre des notes, il flippait un peu. Il avait remarqué que lorsqu’il y avait un truc qui ne marchait pas, Marc notait, donc il pensait que ça allait nuire à sa boite. Alors il venait me voir car il n’osait pas aller voir Marc. Je ne sais pas si Marc l’impressionnait.
MC : Il sait que je suis un vrai biker.
FM : « Euh, ça va bien pour vous ? C’est bon ? Tu crois qu’il n’est pas content ? » Alors, à chaque fois qu’il me voyait, il essayait de me cuisiner.
MC : Je pense qu’il se faisait du souci. J’ai été sympa parce qu’il y avait deux, trois trucs qui ne m’ont pas plu, mais bon ce n’était rien. C’était un bon guide, c’était intéressant. Lui, forcément, peut-être qu’il avait peur que je lui fasse une mauvaise publicité, ce qui n’était pas le but.
Est-ce que certains des protagonistes qui vous ont accompagnés ont lu la BD ?
FM : La BD sort aujourd’hui, on va certainement avoir un retour bientôt mais on ne leur a pas donné un rôle important.
MC : On s’est plutôt concentré sur les personnages principaux. On a un peu élargi le casting avec le pote Gégé et le patron que l’on retrouvera plus tard. Donc on ne pouvait pas rajouter d’autres personnages. Dans tout scénario, chaque personnage a sa particularité parce qu’il faut une gamme de personnages différents, mais si on en met trop, le récit perd en force. Et donc on ne pouvait pas rajouter les gens qui étaient avec nous, qui sont d’ailleurs adorables. Des types super sympas. Ils s’attendent peut-être que l’on raconte des histoires avec eux, mais non.
Et donc la moto jaune existe réellement ?
FM : Mais oui, d’ailleurs, on avait tous rigolé ! Il y en avait même deux, parce que quand on a voulu choisir les motos, il y avait deux jaunes qui restaient et on ne pouvait pas ne pas les prendre. Ça fait moto de facteur, alors à chaque fois, on se foutait de leur gueule. Ce qui n’était pas mal, c’est que l’on mettait toujours une moto en fin de cortège, comme ça, ça permettait de savoir si tout le monde était là. Alors l’autre avait les boules car il était toujours à la fin !
MC : Ce qui ne nous a pas empêchés de nous perdre (rires).
Vous avez rencontré des personnes un peu folkloriques ?
FM : Oui, le docteur du désert.
MC : C’est quand on s’est perdu d’ailleurs.
FM : Oui, on s’était arrêté avant pour faire des photos. Après un grand virage, il y avait un truc pour les touristes, à ce moment on voit un type arriver avec une allure de clodo, sans casque, avec un bandana, un gros duvet crado accroché derrière lui. Il s’est arrêté, puis il nous a demandé si on avait un problème. Sur son réservoir, c’était marqué « The Desert Doctor ». En fait, c’est un type qui dépanne les gens. C’est super sympa, il nous a laissé sa carte.
MC : C’est vrai qu’en France on se fait un signe et c’est tout. Mais les Américains font vraiment un signe et ils s’arrêtent carrément. Lui, il parait qu’il est sur youtube, tu le vois partout. Donc il nous a vus, il s’est arrêté, il nous a dit bonjour, il nous serre la main, nous donne sa carte. Et c’est vraiment une figure là-bas. Il est très connu. Tout ça est partie du fait que l’on se soit perdu. A cause de moi parce que j’ai démarré trop tard en fait…
FM : Parlons-en.
MC : Et on s’est pris la pluie, la grêle… En plus, dans ces endroits-là, généralement il ne pleut jamais. Des fois pendant des années. Et nous, nous avons eu la pluie. Le guide nous a dit que ça fait vingt ans qu’il fait ce boulot et qu’il n’a jamais vu tomber la pluie. Et cette année-là, il a plu !
FM : Là-bas, c’est une ligne droite à perte de vue, il n’y a pas un abri, c’est vraiment un paysage lunaire. Et on voyait les nuages noirs au loin qui avançaient ! On s’est mis en route mais on allait droit dessus et impossible de l’éviter. On a vu un rideau de pluie comme dans la BD. On est entré sous la pluie comme si on entrait dans une douche. Ça a durée dix minutes. C’était le karcher. D’ailleurs on en a rigolé, on ne pouvait plus s’arrêter, car c’était tellement con. On ne pouvait rien faire.
MC : Après il y avait le réservoir qui se vidait et Frank m’a demandé si l’on prenait de l’essence, et moi je lui ai répondu : « non non, on va attendre encore ». Il me dit : « t’es sûr ? » Je lui réponds oui. Alors on a continué. Et la jauge commençait à descendre et là on était vraiment dans le désert. Je lui ai dit : « putain, j’ai fait une connerie, on aurait dû prendre de l’essence ! ». C’est à ce moment-là qu’il a pris le guidon, il a bien conduit avec économie. De mon côté, je voyais le temps qui passait. Sur ces motos, la jauge affiche le nombre de kilomètres que l’on peut faire. Et ça descendait, ça descendait ! Je me suis dit « on va tomber en panne, en plein milieu du désert ». On n’avait pas de téléphone, car on n’avait pas de carte prépayée. On n’avait pas de moyen pour contacter le 4×4, on n’avait pas nos tenues de pluie, parce qu’on les avait laissées dedans.
FM : Heureusement, j’avais gardé l’adresse où l’on dormait à l’hôtel le soir. Si je ne l’avais pas gardée, on n’aurait même pas su où les retrouver.
MC : A un moment donné, on a manqué d’essence. On s’est arrêté, on s’est demandé ce qu’on allait faire. Puis au loin on a vu une pompe à essence. Et voilà, c’était marrant. Après, on a croisé un gros vautour qui était sur le bord de la route puis il s’est envolé devant nous. C’était génial ! Après on a rencontré le Desert Doctor. Ensuite on a retrouvé le groupe le soir qui nous attendait. On a raté Brice Canyon ce jour-là, mais bon c’était sympa. Bien sûr il y a eu d’autres anecdotes.
Ça fait un sacré moment que vous vous connaissez, non ?
FM : Pas tant que ça, ça fait trois ans maintenant.
MC : Oui, à peu près. En fait j’étais fan de Frank quand j’étais étudiant aux Arts Déco à Nice. Et avec les copains on achetait Métal Hurlant. La première chose que l’on regardait, c’était les BD de Frank. Je ne savais pas qu’un jour je travaillerais avec lui. En fait, on ne s’est jamais croisé en festival. Frank en faisait beaucoup. Et puis j’ai vécu un peu au Canada. Un jour, j’ai eu cette idée de projet que je ne voulais pas dessiner. Car je voulais faire une pause dans le dessin. Quant à Frank, ça tombait bien car lui voulait faire une pause dans le scénario. Et comme on a un peu les mêmes références, le même humour, ça a collé tout de suite.
FM : Et quand Marc m’a envoyé ses premières esquisses, avec un style qui fonctionnait, je me suis dit : « mais pourquoi il a besoin d’un dessinateur ? C’est super, ses trucs ! Pourquoi il ne sort pas la BD telle quelle. Il n’a pas besoin de moi. »
MC : Ce qui est drôle, c’est qu’en relisant mes esquisses, à un moment donné j’ai eu un flash, je me suis dit : « tiens, c’est un truc que Margerin pourrait dessiner. » Et le lendemain, il y a eu l’appel de l’éditeur qui m’a dit « ben, moi ça m’intéresse, j’ai aussi parlé avec Margerin et il est d’accord. » C’est là que je me suis dit « waouh génial ! » Parce que Frank est aussi un des rares à être spécialisé dans l’univers des motards. Et Frank est génial, car il ne discute pas mes scénarios.
FM : J’ai tout de suite compris que je n’avais pas intérêt ! Au début, je me suis dit : « tiens, je n’ai encore jamais travaillé avec un scénariste, on va peut être négocier de temps en temps des trucs en se disant : tu ne crois pas que… » Et puis après je me suis dit que non, mes idées ne sont pas forcément meilleures. Mais c’est vrai que dans ce métier il ne faut pas avoir d’ego. Parce qu’au départ on a toujours envie de dire « attends, laisse-moi faire, ça fait 35 ans que je fais ce métier. »
MC : Frank est une des rares stars de la BD, on peut vraiment dire star car il n’y en a pas beaucoup, qui ont une longue carrière et qui soit très humble. C’est ce qui fait la caractéristique des stars.
FM : Je lui retourne le compliment, parce qu’il y a plein de trucs dans mes dessins où il pourrait dire : « euh écoute, là je trouve le personnage… » Il n’y a eu qu’au début, avec le nez de sa femme, qu’il m’a demandé de raccourcir. Et puis après, c’est vrai qu’il m’a laissé une liberté royale. Il a respecté mon point de vue et moi le sien. C’est comme ça que ça fonctionne aussi.
MC : Pour moi, ce qui est important c’est que le dessin soit clair, après il fait comme il veut. Du moment qu’il n’y a pas de confusion, ou quelque chose qui gêne comme une bulle. Après c’est vraiment du détail. Frank a un univers très caractéristique et les gens qui aiment Frank, l’aiment pour son dessin.
Finalement, ce road trip aura été une formidable aventure humaine. Merci à vous d’avoir répondu à nos questions.
Propos recueillis par Audrey Dussaussois.
Interview réalisée le 19 septembre 2014.
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